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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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6 avril 1846

6 avril [1846], lundi matin, 9 h. 

Bonjour mon Toto chéri, bonjour mon bien-aimé, bonjour mon adorable petit Toto, bonjour mon adoré petit homme. Comment vas-tu ce matin ? Bien j’espère. Moi je vais aussi très bien car je t’aime avec plus d’appétit que jamais. Je suis très contente d’avoir insisté hier pour que tu vinsses dans la nuit me voir. Sans cela je serais furieuse ce matin et il y aurait bien de quoi. Je suis très avare de mon bonheur, je ne m’en suis jamais cachée et tout ce qui tend à m’en faire perdre une parcelle me devient à l’instant même odieux. C’est féroce, je ne le nie pas mais c’est vrai. Mon amour, c’est plus que ma vie. Te voir, c’est ma joie et mon bonheur. Du reste, je n’ai encore vu personne ni reçu aucune nouvelle. Clairette va bien ce matin quoique la journée d’hier n’ait pas été très bonne et qu’elle ait très peu mangé. J’aurais très bien pu la reconduire à la pension aujourd’hui si je n’attendais pas encore cette pauvre Mme Luthereau. J’espère qu’elle aura réfléchi qu’elle s’exposait beaucoup pour rien et qu’elle ne viendra pas [1]. Cependant je nea voudrais pas en répondre car la raison jusqu’à présent n’est pas son fort. En attendant, je prête à l’oreille à tous les bruits de voiture et je te désire de tout mon cœur.

Juliette

Je reçois à l’instant même une lettre de Mme Luthereau par la poste de Paris. Je ne t’attends pas pour l’ouvrir et tu comprendras le motif de ma curiosité : c’est partie remise.

BnF, Mss, NAF 16362, f. 345-346
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette

a) « n’en ». 


6 avril [1846], lundi après-midi, 3 h. 

Tu es sans doute occupé à prendre les renseignements touchant cette fameuse pétition [2], mon cher bien-aimé adoré puisque tu n’es même pas venu baigner tes pauvres beaux yeux encore aujourd’hui ? En te voyant si affairé je n’ose pas y ajouter le poids de ma plainte éternelle et sempiternelle sur l’ennui de ne pas te voir depuis un bout de ma vie jusqu’à l’autre. Je me borne à te dire que je t’aime et que je serai bien heureuse et bien contente quand je te verrai. Tâche que ce soit avant soixante trois heures et demie. Je venais de finir de te gribouiller mes tendres bonjours quand une lettre de Mme Luthereau est arrivée par la petite poste. J’ai cru devoir l’ouvrir avant ton retour pour m’assurer si elle ne s’annonçait pas pour tout de suite. Si j’ai mal fait c’est dans une très bonne intention et il ne faut pas me gronder. Du reste, la brave femme ne fait qu’ajourner son stupide projet à la semaine prochaine, ce qui me met dans l’impossibilité de me servir du prétexte de la maladie de Claire. Déjà même je l’aurais reconduite aujourd’hui si tu étais venu assez à temps pour en convenir avec moi. Mais je ne peux pas tarder au-delà de demain matin à moins d’avoir une explication avec Mme Marre et lui dire le véritable motif de la prolongation du séjour de Claire chez moi, chose impossible selon moi. Nous verrons quel sera ton avis à ce sujet. En attendant, je sais très bien quel est le mien, d’avis, c’est que je voudrais vous baiser et vous rebaiser indéfiniment jusqu’à ma parfaite consommation.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16362, f. 347-348
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Laure Luthereau, venue de Bruxelles à Paris pour une affaire délicate et mystérieuse, vient rendre visite à son amie Juliette Drouet.

[2Le 3 avril, Juliette Drouet annonçait à Hugo son intention de lancer une pétition pour obtenir le droit de la voir plus souvent.

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