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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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20 février [1846], vendredi matin, 10 h. 

Bonjour mon aimé, bonjour mon adoré petit Toto, bonjour le plus admirable et le plus admiré des hommes. Bonjour le plus adoré et le plus adorable des Toto, bonjour. Ma vie, mon âme à toi, je t’adore. J’espère que tes craintes sur ton Charlot ne sont pas fondées et que M. Louis les a dissipées d’un mot ce matin [1] ? Je t’attends pour te le demander. La pensée que tu es inquiet m’est insupportable. Hâte-toi de venir le plus vite que tu pourras, mon amour. Je t’attends avec un surcroît d’impatience. Toutes mes péronnelles [2] étaient parties ce matin avant que je ne fusse éveillée. Elles avaient chargé Suzanne de me faire tous leurs remerciements et de me dire toute leur joie et toute leur reconnaissance [3]. Je te les transmets parce qu’évidemment je ne suis dans tout cela que leur prête-nom et que tous leurs embrassements et leurs remerciements vous sont adressés adroitement sous mon nom. Vous le savez aussi bien que moi, vieux Chinois, et je pourrais très bien me dispenser de vous le dire, ce qui ne vous empêcherait pas de le savoir. Baisez-moi et baissez les yeux tout de suite. Je veux que vous ne regardiez personne que moi. C’est peu amusant je l’avoue mais je l’exige plus que jamais. J’ai mes raisons pour cela. Baisez-moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16362, f. 175-176
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette


20 février [1846], vendredi après-midi, 4 h. 

Quel beau temps, mon Victor chéri, et combien je voudrais être où tu es pour te voir, seulement rien que te voir, c’est une félicité et un bonheur suprême. Tu ne peux pas savoir cela, toi, si occupé de grandes choses. Mais moi dont toute la vie est faite de ton amour, je n’ai pas d’autre ambition, d’autre intérêt, d’autre but que de te voir le plus possible, de vivre sous tes yeux et de respirer le même air que toi. Aussi je ferais tout ce qu’on voudrait pour avoir le bonheur de te suivre partout, n’importe comment et à quelque titre que ce soit. Chaque fois que tu pourras me faire aller à la Chambre les jours où tu y seras, mon Toto, je te supplie de le faire et de me donner la préférence sur de simples curieux et même sur les admirateurs et les fanatiques. Je ne consens à me sacrifier que pour ta famille et pour cela il faut que je prenne mon courage et ma générosité à deux mains.
Cher petit homme chéri, je ne sais pas si tu auras pu aller chez M. Pradier et si tu l’auras trouvé, mais dans tous les cas je te remercie de l’intention pour ma fille et pour moi. Car je sens bien que c’est par intérêt pour elle que tu auras cherché à le voir, malgré le peu de loisir que tu as. J’espère que ton pauvre Charlot n’est pas plus malade que ce matin et que M. Louis vous a tous rassurés. Je le désire de toute mon âme et je t’embrasse de toutes mes forces.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16362, f. 177-178
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Charles Hugo est malade, mais ce n’est qu’une indigestion.

[2Juliette Drouet désigne ainsi Claire et ses amies.

[3Claire et ses amis ont assisté la veille au soir à la reprise de Ruy Blas à la Porte-Saint-Martin.

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