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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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17 octobre [1847], dimanche matin, 7 h. ½

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour et bon espoir pour la santé de ta chère femme. Comment vas-tu, mon cher petit homme ? Comment a-t-on passé la nuit chez toi ? Tu comprends que ma pensée ne vous quitte pas d’un seul instant et même dans mon sommeil cette préoccupationa persiste et je rêve de vous tous et toujours je vous aime. J’espère et j’attends de bonnes nouvelles ce matin. Maintenant il me semble que tout le danger est passé et que nous pouvons nous livrer à la douce joie d’une prochaine et prompte convalescence [1].
Je t’enverrai des tomates ce matin en regrettant de n’avoir que cela à te donner. Dieu sait si je voudrais pouvoir vous faire des surprises agréables, hélas ! L’ARGENT ME MANQUE, comme à Don César de Bazan [2], et je n’ai que ma bonne volonté qui n’est suffisante que pour rendre mes regrets plus vifs et plus agaçants. Il est vrai que vous m’abîmez mon album, affreuse compensation. Je vous dirais que votre gribouillis n’est pas encore sec et que je ne peux pas rengainer mon infortuné album dans son étui. O DOULEUR ! Encore si c’était pour moi je ne dirais rien que : MERCI, VOUS ETES UN BON HOMME. Mais quand je pense que ce sera pour un Vacquerie quelconque j’écume de rage et de fureur. Taisez-vous ! Taisez-vous ! Taisez-vous !

Juliette

MVH, α 7985
Transcription de Nicole Savy

a) « préocupation ».


17 octobre [1847], dimanche après-midi, 2 h.

Je suis bien heureuse, mon Victor bien-aimé, de te savoir de plus en plus rassuré sur la vie de ta chère femme [3]. Maintenant il n’y a plus que soins et que patience à avoir et elle n’en manquera pas, la bonne sainte femme, puisque vous êtes là.
Comment vont tes yeux adorés, mon Victor ? Comment va tout ton adorable petit être ? Soigne-toi à ton tour. Maintenant que toutes tes craintes sont finies, il faut songer à te préserver de toutes mauvaises chances. Au risque de t’ennuyer, je te le répèterai bien souvent parce que ta santé c’est ma vie.
Je n’ai pas encore écrit à personne de venir me voir. Tant que ta pauvre femme ne sera pas tout à fait guérie, je ne veux pas ouvrir MES SALONS. C’est une idée que j’ai comme cela. D’ailleurs j’ai l’espoir que tu as encore des barbouillis à faire et cela suffit à mon bonheur et à l’encombrement de ma maison. N’est-ce pas que j’ai raison ?
Tâche de venir de bonne heure aujourd’hui car au fond je suis bien heureuse que tu veuilles bien mettre ma maison à feu et à encre et mon pauvre album en capilotadea. Dépêche-toi de m’apporter cette joie et je t’en serai bien reconnaissante. En attendant je te baise de l’âme et je t’adore.

Juliette

MVH, α 7986
Transcription de Nicole Savy

a) « capillotade ».

Notes

[1Mme Hugo se remet de la fièvre typhoïde.

[2« Hélas ! L’argent me manque », regrette en effet Don César (Ruy Blas, acte IV, scène 2).

[3Adèle Hugo semble désormais hors de danger.

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