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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 septembre [1847], lundi matin, 7 h. ½

Bonjour mon Toto, bonjour mes deux Toto, bonjour tout le monde que j’aime, bonjour, toi, mon âme, bonjour, ma joie, bonjour, ma vie, bonjour, mon amour, bonjour, mon tout, bonjour je t’adore. J’espère que tu dors encore et que tu fais des rêves plus sains que les miens. En faita de rêves je tombe toujours sur de hideux cauchemarsb. Je ne m’en plains pas si la réalité est aussi belle que leurs pronostics sont laids. Mais il faudrait pour cela m’en donner quelques petites preuves car enfin on ne peut pas toujours regarder la vie LES YEUX FERMES.
Quel dommage que je ne puisse pas t’envoyer les superbes tomates et le beau bouquet que Duval vient de m’apporter. Si j’osais, je chargerais Joséphine de te les porter avec l’assiette de chasselas. Mais je crains que cela paraisse singulier, et puis le raisin n’est pas encore tout à fait assez mûr. Rien ne me contrarie plus que de ne pouvoir pas partager avec toi tout ce que j’ai EXCEPTE LE MIROIR CHINOIS. D’ailleurs vous ne me donnez pas assez de pots pour que je m’ouvre les flancs à l’exemple du Pélican. Je vous dis que vous êtes avare comme chicotin [1] et que vous ne méritez pas d’avoir une Juju aussi DESINTERESSEE que moi. Voime, voime, pauvre Chichi tu es bien malheureuse et le pot en faïence est bien beau. Taisez-vous vilain être. Je vous abomine.

Juliette

MVH, α 2011.0.34
Transcription de Nicole Savy

a) « faits ».
b) « cauchemards ».


13 septembre [1847], lundi, midi ¾

Je bénis chaque rayon de soleil parce qu’il me semble que ce sont autant de jours de santé et de force qu’ils apportent à ton cher enfant. Il est probable qu’avant la fin de la semaine la convalescence sera tout à fait la guérison et que vous pourrez aller tous à Villequier. J’aurais même dû dire : que nous irons tous à Villequier car je prétends être du voyage. Ce que je t’en ai dit, mon Victor adoré, c’est pour te faire penser au danger possible de mon séjour à Caudebec. Pour rien dans le monde je ne voudrais être la cause d’aucun trouble ou d’aucun ennui chez toi. C’est ce qui m’a fait te le dire. Du reste mon bonheur est de te suivre et d’être le plus près de toi possible. Je vis et je respire mieux dans ton voisinage et ta douce vue est pour moi le bonheur même. Aussi dépêchez-vous de vous guérir cher Toto SECOND afin d’aller respirer le bon air sous les beaux arbres [2]. J’irai vous admirer de loin, ce qui ne vous fera pas de mal et me fera grand plaisir.
Que je vous y prenne encore, scélérat, et vous aurez affaire à moi : — Quel âge a ton dernier enfant  ? Voime, voime, je t’en donnerai des enfants de SEPT ANS avec une trique et des bas rouges. Quand je pense à cela [3] tous mes nerfs se crispent comme si j’y étais. Je ne te conseille pas décidément d’en refaire un AUTRE même âgé de sept ans.
Baise-moi et sois sage ou je te tue.

Juliette

MVH, α 7979
Transcription de Nicole Savy

Notes

[1Goût amer.

[2François-Victor se remet de la typhoïde.

[3À élucider.

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