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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 août 1864

Guernesey, 8 août [18]64, lundi matin, 7 h. [1]

Bonjour, mon ineffable bien-aimé, bonjour, que mon amour te soit doux et la vie légère, je t’adore. Le cher petit signal n’est pas encore arboré, ce qui me fait espérer que tu répares par un bon sommeil la mauvaise nuit dernière et j’en suis bien heureuse. Quant à moi, j’ai très bien dormi et je n’ai eu qu’un tout petit revenez-y de pyrosisa [2]. J’ai déjà pris ma drogue ce matin, ce qui me donne un peu de vague à l’estomac mais je tâche de m’y habituer pour toutes celles, de vagues, qu’il me faudra [indigérer  ?] d’ici à quelques jours. Pour cela il ne faut pas que j’y pense trop, au contraire. Je donnerais tout au monde pour être bien sûr de n’être pas un trouble-fête et un embarras pour vous pendant ce voyage que je désire et que je redoute. J’ai hâte de mettre pied à terre pour savoir si je peux me fier à moi, cœur, corps et âme. En attendant je me dépêche de débagouler ici tout ce qui me gêne et me fait souffrir. Le temps est couvert ce matin mais il a son charme parce qu’il n’est pas trop chaud. Cela ne fait pas votre affaire à vous, mon cher petit lézard, mais pour moi qui suis un vrai HIBOU j’aime mieux ce ciel, entre chien et loup, que les beaux yeux de môsieur Soleil (pas l’opticien). Il faudra m’apporter aujourd’hui le reste de ce que tu veux que j’emporte pour toi parce que je voudrais pouvoir me reposer entièrement mercredi afin d’arriver saine et sauveb jusqu’au bateau. J’en excepte bien entendu tes engins de toilette. Quant à ton manuscrit, si tu peux me le donner mercredi cela me permettrait de fermer et de boucler la petite mallette, ce qui est une opération. Enfin mon adoré, bien-aimé, fais ce que tu pourras et comme tu l’entendras. Je serai toujours trop heureuse de te servir en tout, pour tout et partout dans la mesure de mes forces, de mon cœur et de mon âme.

J.

BnF Mss, NAF 16385, f. 210
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette

a) « pirhosis ».
b) « saine et sauf ».

Notes

[1Victor Hugo achève la première partie des Travailleurs de la mer.

[2Pyrosis : brûlure d’estomac.

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