3 décembre 1838

3 décembre [1838], lundi soir, 5 h. ¼

Je suis éreintée, mon pauvre petit homme, je souffre des reins et du bas-ventre à ne savoir que devenir. Si je pouvais prendre un bain, je le ferais avec empressement car je souffre outre-mesure. Malheureusement voici que la bonne me dit que les Baigneurs [1] sont déjà là. Je m’en passerai à mon tour et je tâcherai de n’être pas trop maussade quand tu viendras. J’espère aussi mon pauvre bien-aimé que les quiproquos tristes dont nous avons été la dupe ne se renouvelleront plus. Quant à moi, j’en suis sûre car je te vois tel que tu es, le meilleur, le plus beau et le plus généreux des hommes. Je n’ai pas le même espoir ni la même certitude de ton côté. Je ne crois pas que tu me rendes justice à présent ni prochainement mais j’espère que nous serons heureux malgré cela. Je t’aime, mon Victor, et la preuve en est bien évidente dans tout. Il faut être aussi prévenu contre moi que tu l’es pour en douter une seule minute, mais je t’aimerai tant, mais je serai si patiente et si résignée qu’il faudra bien enfin que toutes les mauvaises pensées que tu as sur moi s’en aillent. M^me Krafft n’est pas venue. Il est probable qu’elle n’aura pas touché l’argent aujourd’hui. Je regrette que tu n’aies pas pensé à demander le renseignement des actionnaires à ce Joly pour pouvoir bien montrer que tu t’es occupé de sa commission. Au reste, je sais combien tu as d’affaires pour NOTRE compte et combien tu dois avoir l’esprit fatigué et ennuyé^a. Aussi je ne t’en veux pas, mais je suis contrariée que tout nous arrive à la fois. Je vous aime mon Toto. Papa est bien i.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 196-197
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Gérard Pouchain

a) « ennuié ».