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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 octobre [1838], dimanche midi ¾

Bonjour mon cher petit bien aimé, bonjour mon beau petit homme, comment vas-tu mon adoré ? Comment vont tes yeux et ton rhume ?
Vous voyez bien méchant, que vous n’êtes pas venu, vous voyez bien que j’ai raison de prendre l’occasion aux cheveux, et de ne pas t’attendre assise sur vos belles promesses.
Il fait un temps de loup ce matin, aussi je pense que je serai seule toute la journée et toute la soirée. La mère Pierceau ne viendra pas, et vous devez avoir des masses de répétitions si vous voulez passer mardi [1] ! Je me résigne comme à l’ordinaire. Tout ce qui n’est pas votre faute, je le supporte avec courage.
Pauvre bien aimé, ce temps-là me tourmente, tu as une disposition au rhume, et pour peu que tes chers petits pieds prennent l’humidité, tu achèveras de gagner ce rhume qui n’était qu’ébauché. Je me trouve doublement malheureuse de ne pouvoir te suivre partout, je ne peux pas te surveiller, ni te soigner à mon aise, c’est bien inquiétant, et bien triste. Je t’aime trop mon adoré. Je vous aime trop mon petit homme c’est bien vrai, et bien ennuyeuxa peut-être pour vous.
Je suis bien fâchée de ce que tu m’as dit pour la représentation de Ruy Blas, ce sera une grande privation pour moi mon cher petit homme, car après toi mon plus grand bonheur ce sont tes chefs d’œuvres.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 97-98
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

a) « ennuieux ».


28 octobre [1838], dimanche soir, 18 h. 30

Mon cher petit bien aimé, vous ne pensez pas à moi, je suis sûre, mais moi je vous aime et je vous désire. J’ai pris un bain tantôt, dans le cas où on donnerait la pièce mardi. J’aurai eu à peine le temps de m’arranger, aussi je commence dès à présent à mettre ma personne en ordre depuis les pieds jusqu’à la tête.
Il fait un temps de chien. Tu feras bien de prendre garde à toi mon Toto, avec la disposition au rhume dans laquellea tu es tu aurais bientôt fait d’attraper une fluxion de poitrine. Que Dieu nous en préserve car je ne sais pas ce que je deviendrais si ce malheur-là arrivait.
Tu es sans doute à la répétition, et tu y seras encore ce soir probablement [2]. Heureusement que cela touche à sa fin, et qu’il n’y a plus que patience à avoir. Quantb à moi j’en ai du bout des lèvres, et comme un chien qu’on fouette. Je serai toujours, en quelque occasion que ce sera, très impatiente et très avide de te voir. Toi, toi, et toujours toi, je ne connais que ça, le reste m’est égal ou m’ennuie avec excès y compris la pension de retraite [3]. J’envoie tout ce qui n’est pas toi et mon amour, au Diable, voilà ma profession de foi politique et littéraire. Si cela vous gêne j’en suis fâchée, mais je veux finir mes très vieux jours dans la ville ou vous filerez vos très jeunes [4], pour vous faire enrager et pour vous adorer de tout mon cœur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 99-100
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

a) « lequel ».
b) « quand ».

Notes

[1Ruy Blas sera créé le 8 novembre.

[2Ruy Blas sera créé le 8 novembre.

[3Allusion à élucider.

[4On ne comprend pas le sens, mais la lecture n’est pas douteuse.

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