Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1838 > Octobre > 5

5 octobre [1838], vendredi matin, 11 h. ½

Vous m’avez quittée trop tôt ce matin, mon petit homme adoré, c’est très féroce et très vilain de votre part, surtout si vous n’avez pas une répétition impérieuse ce matin. Me voilà déjà seule ! Et pour toute la journée probablement ? Enfin je vais tenter d’avoir du courage et de la résignation, j’en viendrai peut-être à bout en ne pensant qu’à vous et à notre bonne petite nuit d’hier. Du moins si mon cher petit Dieu n’est pas avec moi je serai dans son ciel, ce qui vaut mieux que d’être seule rue Saint-Anastase, numéro 14 [1].
Je vais écrire à Mlle Hureau et à Mme Lanvin après quoi je m’enfoncerai de nouveau dans mes chiffons jusqu’à ce que je vous revoie. Tâchez, mon amour, que ce soit avant minuit. Jour mon petit o. Jour mon gros To, papa est bien i.
Je vous aime c’est bien vrai, je vous aime c’est bien doux, je vous aime c’est bien fort, je vous adore c’est toute ma vie dans un souffle, dans un baiser et dans un mot.
Je t’aime, je t’aime, je t’aime, je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 15-16
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette


5 octobre [1838], vendredi soir, 11 h. ¼

J’ai voulu finir mes penaillons, cher enfant, avant de t’écrire, c’est seulement à présent que je viens de les serrer dans mon armoire. Depuis tantôt je ne me suis pas assise une demi heure. J’ai bien mal à la tête et aux reins. Je crois que j’ai fait au dessus de mes forces. Heureusement que j’ai encore mon papier à ranger demain, ce qui ne me prendra guère plus de temps ni ne me donnera moins de fatigue. C’est une consolation. Pauvre bien-aimé, je ne te vois presque pas, tu as tant à faire que je n’ai pas le temps de m’approvisionner de ton sourire et de ton regard. Aussi je suis triste la plupart du temps. Je vais cependant aller à une de tes répétitions, je veux voir ce qui se passe et comment tous ces affreux goistapioux se démènent dans votre admirable poésie. Aussitôt que j’aurai mis mes affaires à jour je me donnerai ce petit bonheur là.
En attendant je rognonne dans mon coin, je suis horriblement fatiguée et je vous adore, tâchez de venir tout de suite me baiser sur toutes mes [lassitudes  ? latitudes  ?a].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 17-18
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

a) Le sens invite à lire « latitudes », mais la graphie invite à lire « lassitudes ».

Notes

[1C’est l’adresse de Juliette Drouet.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne