15 avril 1873

Guernesey, 15 avril [18]73, mardi matin, 7 h. ¼

À force de m’indulger, mon grand bien-aimé, je manque presque tous les matins à notre cher rendez-vous, ce qui ne fait pas mon compte. Il va falloir que je me règle un peu mieux que ça afin d’emboîter mon lever avec le tien. C’est déjà bien assez malheureux pour moi que mes vieilles douleurs m’empêchent de te suivre partout comme autrefois. Ce matin je me trouve très bien, comme il m’arrive presque tous les jours en sortant du lit, mais il est rare que ce mieux persiste et fasse le tour du cadran. Pourtant je ne veux pas d’avance prévoir le mal, au contraire, et j’espère que mon bobo se tiendra coi aujourd’hui toute la journée et me permettra de sortir ce soir avec toi. Mais le bonheur des bonheurs serait que tu aies de bonnes nouvelles directes de ton goum tantôt. Je fais force de cœur et d’âme pour cela. En attendant, mon pauvre grand adoré, je te remercie de ton charmant cadeau d’hier ; d’autant plus charmant que tu dois l’illustrer en même temps que le cadre de tes chers petits ravissants enfants. Merci, merci, je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 102
Transcription de Maggy Lecomte assistée de Florence Naugrette