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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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20 juin 1838

20 juin, mercredi midi

Bonjour mon petit bien-aimé, bonjour mon chéri. Ne croirait-on pas que j’ai fait la paresseuse d’une manière exorbitante à l’heure de ma pendule ? Heureusement qu’il est à peine dix heures et demie. J’ai la tête fatiguée et douloureuse comme si une roue de diligence m’était passée dessus. Je vous aime, mon petit homme chéri, je vous aime, mon Toto. Pourquoi que vous n’êtes pas venu ce matin, VILAIN ? Est- ce que mon oreiller et MA VIANDE ne sont pas aussi bons que les vôtres ? Si vous étiez venu, je vous aurais donné une très bonne place dans mon lit et du très bon fricot dans votre geule. Vous êtes une bête et voilà. Oh ! Le joli temps, il est bien i en reniflant. Cependant si vous arriviez LOPINÉMENT pour me mener dîner aux Marronniers [1], je le trouverais très beau et très chaud, mais vous ne serez pas si bête que de me faire changer d’opinion sur le temps, vous y tenez trop. Vous m’aviez dit, mon petit homme, de vous faire penser à répondre au jeune homme aux beaux vers [2]. Voilà déjà plusieurs fois que je vous le disa et vous ne m’écoutez pas. Maintenant je vous l’écris et ma conscience est en repos. D’ailleurs je n’ai pas besoin, moi, de me donner toutes les peines du monde pour écrire à d’autres qu’à moi. Je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 288-289
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « dit ».


20 juin [1838], mercredi soir, 10 h. ¼

Vous êtes mon bien-aimé, vous êtes mon Toto adoré. J’ai cherché et trouvé les deux morceaux de mon aiguille autographe, moins colossalea que celle de Cléopâtre mais probablement plus rare. Je vous permets de la mettre dans votre musée plus ou moins égyptien et je me pique que ce ne sera pas la pièce la moins curieuse de votre capharnaüm. Suis-je assez bonne de rire avec vous, hein, quand j’étrangle du mal de tête ? Il n’y a qu’une Juju dans le monde capable d’un pareil dévouement. En parlant de dévouement, je vous en demanderai bientôt une preuve, mon amour, pour ce foireux album de Mme Kraft. Je sais bien tout ce que vous allez me dire sur cet album, c’est juste mais ne me le dites pas. Souvenez-vous seulement que j’ai reçu des cadeaux à ma fête, au jour de l’an et à ma fête, sans rien rendre et qu’il serait de mauvais goût à nous d’accepter pour ne pas rendre. Cette explication une fois donnée, baisez-moi sur tous mes aises et laissez-moi vous le rendre sur tout votre petit corps adoré. Je vous aime, vous êtes mon grand Toto.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 290-291
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « colossalle ». 

Notes

[1Les Marronniers étaient un restaurant réputé de Bercy.

[2Vraisemblablement Auguste Vacquerie.

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