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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 mai 1836

24 mai [1836], mardi matin, 11 h. ½

Bonjour, mon cher adoré, bonjour mon amour, bonjour mon bien-aimé. Il y a déjà longtemps que je t’ai dit bonjour du fond de l’âme mais Mme Guérard est arrivée au moment où j’allais t’écrire. Elle est restée une heure à me dire des billevesées plus insignifiantes les unes que les autres. Enfin elle est partie.
Tu n’es pas venu, mon chéri, et j’ai eu bien de la peine à m’endormir. Il me semblait toujours que tu allais venir et je voulais être éveillée pour ne pas perdre un seul de tes pas mais tu n’es pas venu et je me suis endormie bien triste, bien triste. Si j’étais bien sûre que nous ferons notre petit voyage bientôt, peut-être serais-jea moins triste encore. Ce serait la même chose, le bonheur en perspective ne peut pas me consoler de la perte du bonheur présent. J’ai trop besoin de toi, de ton amour, pour me payer d’aucune raison quand tu me manques.
Il fait bien maussade aujourd’hui. Tu devrais bien en profiter pour venir passer la journée avec ta pauvre vieilleb Juju. Nous serions bien heureux et nous aurions une belle journée quel que soit d’ailleurs l’état de l’atmosphère.
Je t’aime, mon Victor. Je t’aime. Je fais tout mon possible pour que tu ne t’aperçoivesc pas de mon gros chagrin parce que je ne veux pas te préoccuperd pendant que tu travailles, mais je suis bien triste, va, et je t’aime de toute mon âme.

J.

BnF, Mss, NAF 16327, f. 85-86
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « serai-je ».
b) « vielle ».
c) « apperçoive ».
d) « préocuper ».


24 mai [1836], mardi soir, 8 h. ½

À la manière dont tu m’as quittéea ce soir, mon cher petit homme, je compte peu te revoir, car tu étais trop occupé malgré les efforts apparents que tu faisais pour me le cacher. Pauvre âme, je suis trop raisonnable et je t’aime trop pour ne pas me résigner dans des occasions comme celle-ci. Je ne t’attendrai donc pas, ou plutôt je t’attendrai plus que jamais, et mille fois tant mieux. Si tu viens, je me coucherai et je travaillerai dans mon lit comme j’ai fait hier, c’est très commode pour penser à son Toto chéri. Et puis on est toute portée dans le cas où le Toto aurait une bonne petite réminiscence.
Je vous aime, vous. Je viens faire une petite grimace significative à laquelle vous ne répondez seulement pas, ce qui me ferait grand honte si j’étais à votre place et que vous fussiez à la mienne. Je vous souhaite le bonsoir et la bonne nuit, mon vieux petit homme chéri. Je désire que vous soyez assez bien avisé pour venir me surprendre mais je ne le crois pas.
Je vous aime, vous savez, et puis je vous aime encore plus qu’avant, ce que vous ne saviez pas, ni moi non plus.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16327, f. 87-88
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « quitté ».

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