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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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27 mai 1847

27 mai [1847], jeudi matin, 7 h. ¾

Bonjour toi, bonjour avare, bonjour méchant, bonjour vilain. Je n’ai plus la moindre ramette, ce qui me force à vous écrire sur du papier à peu près propre, à mon grand regret. Si je savais où en trouver qui ait déjà servi, j’irais le chercher pour vous montrer comme j’entends le respect que je dois à votre auguste personne. Eh ! bien alors si ça vous humilie, si ça vous vexe de fond en comble, donnez-moi votre petit dessin [1]. En échange je vous en donnerai deux des miens et si votre hideuse cupidité n’est pas satisfaite, j’y ajouterai mon délicieux encrier et la ravissante vasque qui est dessous. Si vous ne voulez pas encore, je vous donne ma malédiction par-dessus le marché et je vous comblerai de mon mépris. Maintenant que j’ai dit, réfléchissez.
Tu n’as pas encore pu t’occuper d’Eugénie et de M. Z [2]. Elle doit venir dîner avec moi tantôt et probablement qu’elle espère que tu auras déjà écrit. Je sais, moi, combien peu de temps tu as à donner à cette affaire et je regrette presque que tu te sois avancé de toi-même vis-à-vis d’Eugénie. Cher adoré, le meilleur et le plus charmant des hommes, je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16365, f. 120-121
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette


27 mai [1847], jeudi après-midi, 2 h.

J’espère aller te chercher à l’Académie [3], mon Toto adoré ? Cela me fera du bien au corps et à l’âme. Du reste je vais bien aujourd’hui. Mon mal de gorge n’est presque plus rien, et ma tête n’est que lourde. Je suis sûre que, si tu me donnais ton petit dessin [4], je n’aurais plus aucun mal d’ici à bien longtemps. Voyons ! Un peu d’humanité, scélérat, un peu de générosité, monstre, un tantinet de bonne grâce, brigand ! Si tu fais cela pour moi, j’irai te chercher des gants tantôt à bon marché et je te raccommoderai les autres. Heim ! C’est un peu gentil ça. Allons, voyons, ne soyez pas en reste de grandeur d’âme envers moi ; laissez-vous, laissez-vous, laissez-vous attendrir. Hélas ! les pairs [5] de France n’ont pas volé leur réputation de vieux coriaces ; et je ne sais pas dans quoi il faudrait les tremper et combien de temps pour leur faire abouler quelque chose. Taisez-vous, je vous méprise quoique j’aie la faiblesse de vous aimer.

Juliette

Pierpont
[Barnett et Pouchain]

Notes

[1Dans leur édition des Lettres inédites de Juliette Drouet à Victor Hugo (édition citée, p. 49, n. 2), Marva Barnett et Gérard Pouchain notent : « Parmi la vingtaine de dessins datés de 1847, il en existe un, de petit format, qui représente la silhouette d’un burg et qui est accompagné de la mention « 1847, jour de sa fête » (Victor Hugo célébrait la Sainte-Julie le 21 mai). Un autre petit tableau de 1847 – un paysage au clair de lune – qui a également appartenu à Juliette Drouet, porte la mention : « donné à ma Juju le 22 mai [ou mars] » (renseignements aimablement communiqués par Pierre Georgel).

[2Ziegler, vraisemblablement.

[3La séance est consacrée aux récompenses pour les ouvrages les plus utiles aux mœurs.

[4Parmi la vingtaine de dessins datés de 1847, il en existe un, de petit format, qui représente la silhouette d’un burg et qui est accompagné de la mention « 1847, jour de sa fête » (Victor Hugo célébrait la Sainte-Julie le 21 mai.). Un autre petit tableau de 1847 - un paysage au clair de lune - qui a également appartenu à Juliette Drouet, porte la mention : « donné à ma Juju le 22 mai [ou mars] ». (Renseignements aimablement communiqués par Pierre Georgel.)

[5Voir la lettre du matin.

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