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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 mai 1838

8 mai [1838], mardi après-midi, 2 h.

Depuis hier au soir mon cher petit bijou, ma vertu a été récompensée et je suis bien heureuse. Je voudrais que cela continuât encore longtemps. Malheureusement c’est peu probable et je sens déjà la tristesse qui me gagne le cœur. Je crois cependant mon amour chéri que si tu veux tu peux venir déjeuner avec moi presque tous les jours, en t’y prenant bien c’est possible. C’est si doux et si gentil de déjeuner ensemble comme deux bons petits amoureux que nous sommes. Mon Dieu, que je t’aime. C’est bien vrai, bien vrai.
Je vais écrire à Jourdain pour le compte, le miroir et la frange. Mme Pierceau est partie : nous ne pouvions guère faire autrement que de l’inviter à déjeuner et vous avez été bien charmant et beaucoup trop joli. Je vous défends de montrer vos admirables dents aux femmes. Je n’ai pas besoin, moi, que vous montriez toutes vos perfections comme ça à toutes les femelles. Aussi je veux que vous cachiez vos petits pieds, vos jolies mains et votre belle figure à tout le monde excepté à moi. Je rappelle à mon Toto que je l’adore et que je l’attends avec amour et une provision de caresses.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 124-125
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette


8 mai [1838], mardi soir, 6 h. 20 m.

Je vois bien, mon petit homme, que ma vertu ne sera pas récompensée ce soir mais cela ne m’empêchera pas d’être très bonne, très vertueuse et très amoureuse. J’ai travaillé après ma portière jusqu’à présent, j’en ai les yeux touta brouillés, c’est à peine si j’y vois pour écrire. Heureusement qu’il fait très clair dans mon cœur. Votre amour, mon Toto, c’est plus qu’une lumière, c’est une flamme qui me brûle. Vous seriez bien charmant, mon Toto, si vous me meniez ce soir à Angelo [1]. Si vous êtes juste vous me devez bien cette compensation pour la séance d’hier à la Porte Saint-Martin, ou bien si vous ne voulez pas absolument me donner le plaisir d’applaudir mon Angelo, prenez-moi sous votre bras et faites-moi marcher. Si vous travaillez je ne vous parlerai pas, je ne ferai que vous regarder ; enfin mon Toto bien aimé, tâchez que ma soirée ne soit pas tout à fait solitaire. Mais j’y pense, mon amour, n’est-ce pas aujourd’hui que tu comptes avec Bernard ? C’est sans doute là la cause qui fait que tu ne viens pas. Mon bien-aimé je pense à toi. Je t’aime. Je suis bonne et patiente et je baise tes jolis petits pieds blancs.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 126-127
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette

a) « tous ».

Notes

[1Angelo tyran de Padoue est repris à la Comédie-Française.

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