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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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5 décembre [1849], mercredi matin, 8 h. ½

Bonjour, toi, bonjour monstre d’homme, bonjour, vous venez de m’en faire voir de drôles tout à l’heure en rêve. Oh ! Scélérat, prenez garde que ma juste indignation ne vous poursuive en réalité et ne vous fasse payer cher vos fariboles nocturnes et vos turpitudes au grand jour. Je suis encore dans une agitation excessive que rien ne peut calmer tant ces vilains rêves ont l’air de ressembler à la réalité. J’ai cependant fait ouvrir mes rideaux pour y voir plus clair, mais jusqu’à présent je ne vois que les affreux songes de la porte de L’ORNEa qui me font des langues et des pieds de nez significatifs. Toto, toto, toto, toto, toto, toto, prenez garde à vous car je crois que le moment fatal approche et même qu’il est venu. Avec tout cela je suis triste et mal en train. Triste de tout et de bien autre chose, sans parler du regret de ne pas être à l’Assemblée aujourd’hui. Mais le moyen de rester six heures assise dans l’état où je suis pour le moment ? Voilà pourquoi j’ai dû refuser d’aller à cette séance malgré tout le regret que je savais en avoir. Car pour moi, toutes les séances où tu ne parles pas se valent et le seul intérêt que j’y trouve c’est de te voir et en homme. Je n’aurais pas perdu pour cela mon trajet puisque nous serions revenus ensemble. Décidément, je suis une bête de n’avoir pas accepté au risque de me tordre tout le temps dans les coliques les plus TRANCHÉES. Une autre fois, je me risquerai nonobstant l’inconvénient. En attendant, je bisque, je rage, je souffre et j’ai le front inquiet. Il me semble que j’y sens pousser toute une ramure trop luxuriante. Prenez garde que je ne cherche à l’encorder sur vous. Taisez-vous, baisez-moi et payez-moi mon omnibus plus vite que ça, car si j’ai la tête d’un cerf je n’en n’ai pas la jambe.

Juliette

MVHP, Ms a8308
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux

a) « LORNE ».

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