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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 août [1849], mardi matin, 6 h. ½

Bonjour, mon cher petit Toto, bonjour, mon doux amour, bonjour. Me voici enfin à la tête de mes trois Bretons, dont un Allemand [1]. Jusqu’à présent, je ne suis pas mieux informée sur le temps de leur séjour à Paris qu’avant leur arrivée. Je sais seulement qu’ils sont attendus à Brest pour affaire et qu’ils ne comptent pas rester longtemps ici. Mais qu’est-ce qu’ils appellent longtemps ? Voilà la question. Quant à moi, mon bien-aimé, il me serait impossible de renoncer au bonheur de te conduire à Villequier. Plus le moment approche et plus je sens qu’il me serait impossible de faire ce sacrifice à ces pauvres bonnes gens que j’aime pourtant bien cordialement et bien fraternellement. J’espère qu’ils comprendront que je ne peux pas perdre, à l’occasion de leur visite à Paris, le bonheur si court et si rare de passer quelques jours avec toi. Jusqu’à présent, je n’ai pas encore pu parler de cela dans la crainte d’éveiller leur susceptibilité. Mais je pense en faire naître l’occasion aujourd’hui tout naturellement, et les prévenir que je ne saurais être avec eux plus de six jours. Pour que la chose leur paraisse moins dure, je resterai avec eux le plus possible et je les promènerai à travers Paris à bride abattue. Il faudra que tu viennes me voir le soir avant de te coucher pour que j’aie plus de toi à aimer.

Juliette

MVHP, Ms a9146
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux


28 août [1849], mardi matin, 7 h.

Je continue mon gribouillis sans reprendre haleine, car le temps me presse. Je désirerais, mon adoré, ne pas perdre les quelques minutes que tu as coutume de me donner tous les jours et dont je ne peux pas me passer. Pour cela il faudrait que tu pussesa venir après l’heure de ton dîner, car tu comprends combien il me serait difficile de prendre dans la journée le temps de venir t’attendre chez moi. Il faut, pour que mon départ ne puisse pas les [2] blesser et paraître un prétexte d’inhospitalité, que les six jours qui me restent d’ici au trois [3] leurb soient entièrement et exclusivement consacrés. Tu le comprendras, n’est-ce pas mon adoré, et tu te prêteras à la circonstance avec ta complaisance et ta bonté accoutumées.
Si tu pouvais me prêter ta médaille pour voir les choses fermées, tu me rendrais un très grand service. Je suis parvenue à les incruster chez ces pauvres Vilain [4] qui sont bien les meilleurs gens du monde. Je ne sais pas ce qu’on fera aujourd’hui. Cela dépendra de l’état de la santé de ma sœur qui est arrivée assez souffrante. Quant à son mari il a de la santé et de la force pour toute la Bretagne réunie. Mon neveu est un gamin de quatorze ans très espiègle et très gâté à ce qu’il m’a paru [5]. Enfin tout ce monde-là paraît m’aimer un peu et je sens que je les aime aussi au redoublement de mon amour pour toi.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1849/58
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette

a) « pusse ».
b) « leurs ».
c) « réservés » a été remplacé par « consacrés ».

Notes

[1Sa sœur Renée, son beau-frère Louis Koch, et leur fils Jean-Louis Koch.

[2La sœur de Juliette Drouet, son beau-frère et son neveu qui arrivent à Paris ce 28 août 1849 (Lettres familiales, p. 28-29).

[3Au 3 septembre 1849.

[4Victor Vilain et Eugénie.

[5Louis Koch fait aussi la connaissance de sa tante. Il évoquera le 16 juin 1863 cette visite de Paris dans une lettre adressée à Juliette Drouet (Lettres familiales  ; lettre 57, p. 142-143).

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