22 février 1860

Guernesey, 22 février 1860, mercredi matin, 8 h.

Bonjour, mon cher petit homme, bonjour comment va ton cœur ce matin ? Tu paraissais en souffrir beaucoup hier au soir. As-tu usé de la friction ammoniacale^a ? Je me souviens maintenant qu’Yvan m’avait conseillé ce genre de friction, non un liniment mais seulement ⅔ d’eau, ⅓ d’ammoniaque^b et au besoin laisser une compresse sur la douleur de ce même mélange. Je crois que le liniment est préférable en ce qu’il pénètre la peau sans faire d’humidité ni de refroidissement autour de la partie souffrante. L’important est d’user du remède avec opportunité et voilà ce que je crains que tu ne fasses^c pas. Cependant tu sais bien, mon pauvre cher adoré, que ta santé c’est ma vie et plus que ma vie c’est mon bonheur. Donc il faut vous bien soigner si vous voulez que je me porte bien, que je sois GEAI et heureuse. J’espère que malgré ta douleur tu as bien dormi. Quant à moi j’ai passé une bonne nuit interrompue ce matin par la musique GUERRIÈRE des soudards qui s’en allaient ou qui arrivaient mais je n’en ai pas moins très bien dormi toute la nuit. Je serais bien fâchée pour toi du point de vue ton impartialité si indulgente et si conciliante si on ne pouvait pas inviter Colbert à temps pour ce fameux banquet. Je crains qu’il n’y ait dans cette affaire comme pour la pièce de ton bon Charles beaucoup de stupide cabotinage [1]. Après cela tout s’arrangerait et réussirait d’autant plus [plusieurs mots illisibles] pris de mauvais [plusieurs mots illisibles] je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16381, f. 31
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette

a) « amoniacale ».
b) « amoniaque ».