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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 avril [1838], lundi matin, 10 h. ¾

Bonjour mon adoré, bonjour ma joie. Je suis bien fatiguée et bien souffrante mais je t’aime de toute mon âme. Je ne sais pas comment je ferai pour me lever et pour faire la conversation avec le Barthès mais je sais que j’aurai de l’amour et des caresses pour toi quand je te verrai. J’ai si peu dormi depuis deux jours que je ne me tiens ni sur la tête ni sur les pieds. Toutes ces infirmités disparaîtront si tu m’aimes un peu. J’espère, mon adoré, que les deux vilains jours qui viennent de s’écouler n’auront laissé aucun mauvais germe dans ton cœur et que tu continueras de m’aimer comme autrefois. Moi cela va sans dire que je t’aimerai d’autant plus que je suis méchante et bête, mais toi qui as les deux qualités opposées pourras-tu m’aimer ? J’en doute et je suis triste au fond de l’âme. Je t’attendrai ce soir auprès de mon feu avec résignation et amour. Je ne parle pas de résignation pour manquer le spectacle d’aujourd’hui qui est stupide, mais la résignation à t’attendre longtemps quand je sens le besoin de te voir toujours. Crois bien ce que je te dis, mon amour, car c’est la vraie vérité. Je t’adore. Je suis injuste, je suis méchante, je suis folle mais je t’aime du fond du cœur. Oh ! C’est bien vrai ! Voilà deux matinées que nous passons bien bêtement. Il n’aurait tenu qu’à vous qu’elles fussent les plus heureuses et les plus ravissantes de notre vie. C’est bien triste de penser que c’est vous qui ne voulez pas que nous soyons heureux. Mais je ne vous en tiens pas quitte et demain vous me paierez tous mes arrérages. En attendant je tâche d’avoir le plus de force et de courage que je peux pour vous attendre et pour faire fête à ce hideux et stupide Barthès. Heureusement que Claire comprendra la moitié. Je t’aime toi. Je vous adore vous.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 52-53
Transcription de Mathieu Chadebec assisté de Gérard Pouchain

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