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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 juin 1844

25 juin [1844], mardi, midi

Je t’écris bien tard, mon cher adoré, mes fraises en sont la cause. La bourriche est arrivée à huit heures et j’ai eu la précaution de l’ouvrir tout de suite pour les trier et mettre de côté pour toi toutes les plus belles et les plus saines. Je ne peux pas te dire quelle joie me causait chacun de ces monstres en pensant aux bonnes petites gueules qui devaient les engloutir. Tu es au fond de toutes mes pensées et de toutes mes actions, toutes mes joies me viennent de toi. Tu es ma vie-même. Si tu savais combien c’est vrai, mon adoré, tu ne pourrais pas t’empêcher de m’aimer de toute ton âme et de me préférer à toutes les autres femmes, même les plus jeunes, les plus belles et les plus spirituelles. Tu serais heureux et fier d’un amour aussi complet, aussi ardent, aussi fidèle, aussi dévoué, aussi passionné que le mien. Mon bien-aimé, mon bien-aimé, sois béni dans tous ceux que tu aimes. Sois heureux, je t’adore. Je voudrais mourir pour toi.
Tâche de revenir tout à l’heure, mon Victor chéri. C’est un si grand bonheur pour moi de te voir. Il me semble que mon cœur s’épanouit comme un bouquet.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 191-192
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette


25 juin [1844], mardi soir, 7 h. ¼

Mon ravissant petit homme, mon beau, mon noble, mon charmant, mon adoré Toto, tu es ma joie, mon bonheur et ma vie, je t’aime.
Je voudrais que tu aies bien faim, bien faim ce soir de bonne heure pour te forcer à revenir bien vite auprès de moi. J’espère que les bonnes fraises t’ouvriront l’appétit et que tu seras forcé de venir dévorer beaucoup plus tôt que d’habitude.
Vous savez que je suis indigne de votre férocité pour les verres qui ne sont pas verts mais piqués des vers, monsieur l’académicien. [Dessin]a. Soyez tranquille, quand les vôtres me tomberont sous la griffe, vous verrez comme je les arrangerai. Vous regretterez de m’avoir exaspéréeb, mais il ne sera plus temps, ce sera bien fait, vous n’aurez que ce que vous méritez. Vous pleurerez des larmes de sang mais je serai sans pitié pour vous comme vous l’avez été pour moi. Je veux que ce soit effrayant ! Y compris mon dessin qui doit vous faire dresser les cheveux d’admiration. Je ne me suis point laissée influencer pas les classiques comme Mme Dubufec [1]. J’ai conservé toute ma naïveté primitive et cette gaucherie charmante que la sienne ne saurait vous donner. Voime, voime, mais je suis furibonde et je voudrais me venger tout de suite.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 193-194
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) Dessin : Juliette jette ses vers à la tête de Victor.

© Bibliothèque Nationale de France

b) « exaspérez ».
c) « Dubuffe ».

Notes

[1Possible allusion à la sculptrice Juliette Dubufe (1819-1855).

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