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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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26 février [1844], lundi matin, 11 h.

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour mon adoré petit homme, comment vas-tu ce matin ? Comment vont tes pauvres yeux ? Je n’ai pas voulu t’en parler hier mais je me suis bien aperçuea qu’ils étaient bien fatigués. Je n’ai pas osé te prier de ne pas augmenter leur fatigue parce que je savais d’avance que ma prière ne serait pas écoutée et puis parce que je craignais d’augmenter ton mal en t’en parlant. J’aurais dû même ne pas t’en écrire mais le moyen de garder le silence absolu sur ce qui vous intéresse plus que votre vie ? Pour moi je n’ai pas cette force, je t’en demande pardon mon adoré.
Le temps est encore bien noir aujourd’hui. Je suis bien enrhumée, cependant si j’osais je te prierais de me conduire chez cette pauvre Mme Pierceau [1]. Je me reproche tous les jours de n’y pas aller, je trouve que c’est une mauvaise action dont je me rends complice en ne te forçant pas à m’y conduire. Je crains que le bon Dieu ne me fasse expier chèrement un jour l’amour trop exclusif que je t’ai voué. Je sais bien que tu travailles mais tu pourrais si tu voulais et sans te déranger m’y conduire en même temps que tu vas aux Champs-Élysées, chez M. de Ségur ou de Girardin. Pardon, je ne voulais pas me plaindre et malgré moi cela m’échappe. C’est que cette fois ma souffrance personnelle est mêlée du remordsb de laisser mourir cette pauvre femme sans l’assister de mon amitié. Je t’aime trop mon Victor.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16354, f. 221-222
Transcription de Chadia Messaoudi assistée de Chantal Brière et Florence Naugrette

a) « aperçu ».
b) « remord ».


26 février [1844], lundi soir, 5 h. ½

Je m’étais préparée de bonne heure, mon cher amour, dans l’espoir d’une sortie. Cela ne m’a pas réussi comme tu vois. C’est toujours mon tour à rester à la maison quel quea soit l’état du baromètre. Pourtant je ne veux pas te gronder parce que je suis sûre que c’est que tu ne l’as pas pu. Si tu as pensé à moi, si tu m’as regrettée et si tu m’aimes, je suis trop heureuse et je n’ai pas le droit de me plaindre.
J’ai écrit à Dabat et à Jourdain ce matin, probablement ils arriveront tous les deux à la queue leu leu demain. Si tu penses à m’apporter ta botte, je crois que cela vaudra mieux puisque tu en as besoin tout de suite [2]. Je voudrais bien aussi que tu pensassesb à m’apporter le paquet [3] de Lanvin. Ces pauvres gens-là seront toujours heureux de l’avoir le plus tôt possible.
Mon cher petit bien-aimé, je serai bien heureuse si tu viens bien vite. Je suis impatiente de te voir pour beaucoup de raisons enfermées dans une seule, c’est que je t’aime de toute mon âme. En attendant je pense à toi et je te désire immodérément. Baisez-moi Toto et dépêchez-vous un peu bien vite, je vous attends.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16354, f. 223-224
Transcription de Chadia Messaoudi assistée de Chantal Brière et Florence Naugrette

a) « quelque ».
b) « pensasse ».

Notes

[1Mme Pierceau est gravement malade

[2Juliette a fait faire une paire de nouvelles bottes à Victor Hugo auprès de Dabat. Or, la botte droite ne lui va pas et Dabat doit la refaire.

[3Le contenu du paquet est inconnu.

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