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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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17 décembre [1837], dimanche

Bonjour mon Toto bien aimé. Je ne sais pas l’heure. La pendule est arrêtée à 4 h. du matin. Je vous aime, voilà mon heure. J’ai bien dormi tantôt et cependant je n’ai point éteint ma lampe un quart d’heure après votre départ. Vous voyez donc bien que c’est moi qui ai raison. Je voudrais bien savoir si tu as dormi aussi toi, pauvre bien-aimé, car c’est toutes les nuits ton tour pour travailler.
Je voudrais bien que le matin tu vinsses te reposer près de moi. Il est triste de penser que depuis quinze jours tu ne m’as pas donné cette préférence sur ton lit froid. Je ne dis pas encore tout ce que je crains. Je veux attendre à plus amples informations pour m’expliquer sur cette séparation de corps.
Bonjour mon Toto. Vous êtes bien gentil. Voime, voime. Je m’en fiiiiiiche. Aussi je vais prendre du café pour vous punir et je ne prendrai que cela. C’est bien fait. Tant mieux.
Je ne vous verrai sans doute que ce soir. C’est fort amusant. Je trame quelque chose, méfiez-vous. Je ne vous prends pas en traître. Jour Toto. Je vous adore, vilain homme, et il n’y a certainement pas de quoi. Bonjour donc, et tâchez d’être aussi VERTUEUX que je suis amoureuse ou sans cela prenez garde à mon grand couteau [1].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16332, f. 179-180
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein


17 décembre [1837], dimanche soir, 10 h. ¼

Mon cher petit Toto, je voudrais bien vous voir et vous baiser, d’abord pour vous demander pardon de ne vous avoir pas compris tout d’abord tantôt car il me paraît à peu près démontré que vous avez raison. Je m’avoue doublement vaincue si vous venez très tôt.
Mme Pierceau vient de s’en aller. Nous n’avons parlé de rien après que tu as été parti, du moins de ce qui concerne le théâtre, ah ! Cependant il a été question de la JALOUSIE et sur ce sujet je ne suis jamais muette. Aussi nous en avons débité ni peu, ni trop, mais assez. Vous aurez à me rendre compte tout à l’heure des faits et gestes de Mme D [2]. Je suis très inquiète et prête à prendre la diligence pour ne plus revenir.
Soir pa. Quelle vie que la mienne. Je ne te vois plus. En vérité c’est un titre bien honorifique que le mien et je ne vois pas ce que je perdrais pour le changer. Bonsoir donc, puisque je ne peux plus te dire BONJOUR. Bonsoir, bonne nuit. À bientôt pour cinq minutes. J’ai mal à la gorge. Je ne peux pas avaler ma salive ni votre conduite depuis quinze jours. Je vous aime tout de même et peut-être à cause de cela. J’aimerais peut-être moins un honnête homme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16332, f. 181-182
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein

Notes

[1Traître, vilain, homme vertueux, couteau : Juliette joue sur la gamme du cliché mélodramatique.

[2Probablement Mme Dorval.

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