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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey 23 février [18]70, mercredi , 8 h. du m[atin]

Bonjour, mon cher bien-aimé, comment ta nuit ? Je serai bien contente si elle a été aussi bonne que la mienne. En attendant ta réponse, je viens de lire la charmante petite (trop petite) lettre de ton Charles. Je vois bien qu’elle en dit plus long de tendresse qu’elle n’est grosse. Mais c’est égal, ce qui abonde ne vicie pas et j’aurais aimé qu’elle entre dans plus de détails sur les faits et gestes du citoyen Georges et sur le marivaudage de Petite Jeanne. Après cela, nous serons à même d’en juger bientôt par nous-mêmes s’ils tiennent leur promesse [1] comme je l’espère. Il va falloir que tu donnes des ordres pour préparer leurs appartements afin qu’ils se trouvent tout de suite chez eux en arrivant. Moi je livre d’avance pieds et poings liés mes cocottes au citoyen Georges et mon gazon fleuri à Miss Jeanne. Suzanne ses petits plats dans les grands. Vous voyez que de mon côté tout est déjà prêt pour la cérémonie. Je vous charge de le leur dire très tendrement de ma part et de vous coller dans le fusil ceci [2] : je vous adore.

BnF, Mss, NAF 16391, f. 60

Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette

Notes

[1Promesse de venir à Guernesey, qui sera tenue à la fin du printemps.

[2« Colle-toi ça dans le fusil », dit Gavroche à son petit frère en lui tendant le pain qu’il vient de lui acheter (Les Misérables).

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