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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 juillet [1839], mardi midi

Bonjour mon petit homme chéri. Bonjour mon adoré. Je te préviens que ma pendule est folle afin que tu ne croies pas que je me suis levée à des heures indues. Je n’ai pas encore les quittances du loyer ; le portier dit qu’il les aura aujourd’hui. J’espérais que tu viendrais cette nuit ; nous avions un peu d’argent, et le loyer était prêt, c’était le moment de se livrer à la joie et au repos. Mais vous êtes impitoyable pour vous et pour moi. J’ai fait pousser de grands cris d’admiration à ma servarde sur les éponges. Maintenant nous voilà À SEC pour longtemps, y compris tous les hideux calemboursa que l’on peut entrevoir dans chacun des petits trous. Je suis triste dans le cœur de penser que votre cher petit portrait sur lequel je comptais pour me réjouir le jour de votre fête n’est même pas commencé. Rien n’est plus triste que ça parce que je sens qu’il n’aurait fallu qu’un peu de complaisance de ta part et de bonne volonté de celle de Boulanger pour me faire une grande joie [1]. J’ai l’air d’une pauvre femme qu’on n’aime plusb. Autrefois vous faisiez l’impossible maintenant vous ne faites même plus le très possible, c’est bien vilain et bien cruel à vous d’agir ainsi envers une pauvre Juju qui vous aime de toute son âme. TAISEZ-VOUS. Vous n’avez pas le droit de répondre autrement qu’en m’apportant tout de suite ce que je désire.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16339, f. 115-116
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « calembourgs ».
b) « qu’on aime plus ».


16 juillet [1839], mardi soir, 7 h. ½

Je vous aime, mon Toto. Je vous aime, mon amour, vous êtes un petit homme charmant, et comme tout ce qui est ravissant et précieux vous êtes rare et CHER. J’espère que vous prendrez mon calemboura sans le MARCHANDER ? Oui vous m’êtes très cher car toutes les richesses du monde entier ne paieraientb pas le petit bout de votre ongle, ainsi jugez du reste ! Oh ! si vous pouviez m’aimer seulement la moitié de ce que je vous aime, personne ne supposerait que vous êtes au balcon de la Porte-Saint-Martin sans moi. C’est une illusion que je ne fais à personne, moi. Car il est avéré pour tout le monde que je vis seule dans mon amour sans désirer et sans chercher aucune distraction hors de lui. Je vous aime mon amour. Je vous aime mon adoré. C’est une supériorité incontestable que j’ai sur vous. Je t’aime, mon pauvre ange. Je t’aime d’un amour passionnéc et divin. Tu es mon amour et ma religion. Je ne crois à Dieu qu’en toi. Je ne vois le ciel que dans tes yeux, le paradis dans ton âme. Tu es mon tout, bien plus que ma vie. Je t’aime, pense à moi du haut de tes pensées. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16339, f. 117-118
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « calembourg ».
b) « paierait ».
c) « passionnée ».

Notes

[1Hugo a promis à Juliette son portrait réalisé par Louis Boulanger.

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