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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 mai 1840

3 mai [1840], dimanche matin, 8 h. ½

Bonjour mon Toto bien-aimé. Bonjour mon amour. Comment vas-tu ce matin ? Moi je t’aime voilà ma santé, ma vie, ma joie et mon bonheur. Je voudrais être toujours et sans cesse avec toi. Voilà mon mal, mon chagrin et mon désespoir. Voici Résisieux qui danse et qui prétend qu’elle n’aime pas les PUCES, antipathie que je crois peu fondée, elle ajoute qu’elle contente de joie d’aller à son jardin avec son volant d’un sou. Le malheur est qu’elle est [ENSIFORNÉE ?]. Ça fait qu’on ne l’entend pas parler et qu’on croirait qu’elle est [DÉGUISMÉE ?] et ainsi de suite mais je ne veux plus l’écouter, c’est une petite jacasse. Je ne veux que parler avec vous c’est plus gentil.
Je t’aime mon Toto chéri. Je voudrais que ce fût aujourd’hui la veille de notre départ. Oh ! que je serais contente, quel bonheur !!! J’aimerais mieux ça encore que la soupièrea [1]. Mon Dieu, je voudrais être partie au prix de dix ans de ma vie. C’est seulement en voyage que nous vivons, que nous nous appartenons, que nous sommes heureux et que notre amour rayonne. Oh ! que je voudrais y être. Je t’aime mon Toto, mon amour, mon ravissant petit homme, je t’aime. Cette petite Résisieux fait un bruit affreux, elle prétend qu’elle emportera son ombrelle parce qu’elle n’a pas envie de s’emplir plein de soleil. Moi je voudrais m’emplir plein de vous. Je ne mettrais pas d’ombrelle pour m’en garantir, je vous assure. Je voudrais te voir mon Toto. Viens vite, j’ai à te baiser bien fort, bien fort. C’est très presséb. Venez vite Toto et aimez-moi aussi vous de votre côté. Je vous attends, je vous désire, je vous aime et je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF, 16342, f. 101-102
Transcription de Chantal Brière

a) « soupierre ».
b) « pressée ».


3 mai [1840], dimanche après-midi, 4 h.

Mon toto, mon Toto où êtes-vous que je vous baise et que je vous batte pour vous apprendre à me laisser toute seule dans un coin comme un pauvre chien ? Je vous aime moi, je vous désire et je mets toute ma joie et tout mon bonheur à vous voir. Voici bien longtemps déjà que vous ne me faites pas sortir le jour, c’était pourtant bien gentil et vous devriez reprendre cette bonne habitude. Est-ce demain que paraissent Les Rayons et les ombres ? J’espère que je serai une des premières servies et que je pourrai me délecter à mon aise dans toute cette adorable poésie ? N’oubliez pas non plus, mon amour, que vous m’avez promis des choses à copier ; j’y tiens de tout mon cœur et vous me feriez beaucoup de chagrin si vous donniez des copies à d’autre qu’à moi qui y metsa, sinonb MA BELLE ÉCRITURE, du moins toute mon âme et tout mon amour. Aussi je vais vous tourmenter pour avoir des copies et pour ravoir mes chers petits autographesc et toutes mes épreuves corrigées. Je ne vous ferai grâce de rien pas même de mon amour dont je vous ennuie à force de vous en donner de toutes les façons, sous toutes les formes, de toutes les manières et dans tous les temps. Baisez-moi vieux Toto, aimez-moi et venez très tôt que je vous baise sur toutes les coutures.

Juliette

BnF, Mss, NAF, 16342, f. 103-104
Transcription de Chantal Brière

a) « met ».
b) « si non ».
c) « authographes ».

Notes

[1Dans les lettres du 26 avril et du 2 mai, Juliette a dessiné une soupière et exprimé le bonheur de la posséder.

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