25 juin 1881

Paris, 25 juin 1881, samedi matin, 7 h. ½

Pendant que tu tapes de l’œil dans ton dodo, moi je te roucoule ici mon tendre bonjour, non sans avoir déjà maugréé contre la chaleur qu’il fait ; je ne m’y résigne qu’en pensant que, ce qui me fait suer sang et eau, te fait ruisseler de santé et de joie. À ce compte je trouve que tout est bien et que j’ai tort de grogner.
Séance publique au Sénat à 3 heures. M^me Edmond Adam t’écrit pour te supplier de faire décorer le jeune Jean Aicard. Après le don de sept mille francs de l’Académie, la Croix ; l’appétit vient en mangeant et ce jeune cigalien me paraît avoir une insatiable fringale. Je te porterai la supplique, très charmante, d’ailleurs, dès qu’il fera jour chez toi.
Lesclide m’a envoyé ce matin deux fruits du midi, deux ananas dans leur paille. Nous leur ferons honneur demain au détriment des fraises fraîches que nous laisserons à la fruitière au moins ce jour-là. Il est à remarquer que jamais ces sortes de galanteries n’arrivent en temps opportun, ce qui n’empêche pas la bonne grâce de ceux qui les envoient, au contraire. Et ce qui ne m’empêche pas, non plus, de t’adorer en tout temps, en tous lieux^a, à toute heure^b.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

Collection particulière, MLM, 62260 0125/0127
Transcription de Gérard Pouchain
[Charpentreau]

a) « tout lieux ».
b) « tout heure ».