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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 10 décembre [18]63, jeudi matin, 8 h.

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour et joie tout plein mon cœur si, comme je l’espère, tu as passé une aussi very good nuit que moi-même. J’ai dormi comme un vrai sabot. Et toi ? Et vous ? Répondez, si vous l’osez, avec la même assurance que moi. Je vous ai entrevu tout à l’heure essayant de [illis.] votre lit au brouillard et à la pluie. Heureusement que cette fantaisie gribouillardesque s’est arrêtéea à temps pour que vos couvertures, votre matelas et le reste ne soient pas mouillés jusqu’aux os. Il n’y a guère moyen de songer à errer sur la colline aujourd’hui mais je crois qu’il serait bien temps d’installer la collation du Shakespeare si tu ne veux pas être pris de court pour l’impression. Je prêche un peu pour le saint de Lacroix mais encore plus pour le mien propre car je suis impatiente de fourrer mon nez dans toutes les belles choses que tu dis à propos de Shakespeareb [1]. Il y a si longtemps que cela ne m’est arrivé que je voudrais bien recommencer le plus tôt POSSIBLE. En attendant je ne peux pas m’empêcher de regretter le temps où je te suffisais toute seule sans le moindre secours d’aucune Mme Chenay ni d’aucune Victoire [2]. Hélas ! hélas ! hélas ! ce temps-là est passé pour ne plus revenir ! Je me console dans mon amour, sûre que je sais que personne ne pourra jamais t’aimer autant ni aussi bien et puis je pense à toi et puis je te souris et puis je t’adore.

J.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 278
Transcription de Gérard Pouchain

a) « c’est arrêté ».
b) « Shaskpeare ».


Guernesey, 10 décembrea [3] [1863], jeudi 2 h. ½ après-midi

Je n’ai de joie qu’en toi, mon bon petit homme, c’est pour cela que je trouve le temps où je ne te vois pas si long et si triste. J’espère te voir un peu plus aujourd’hui qu’hier et qu’avant-hier puisque les BELGES [4] sont à Jersey et que tu n’as personne à dîner aujourd’hui en dehors de ta famille. Je me prépare à faire une bonne petite promenade ce soir. En attendant j’observe avec sollicitude les travaux de ma maison et je désire impatiemment le jour où je pourrai prendre possession entièrement de ma maison qui sera un vrai bijou grâce à toi, mon doux adoré. Demain matin on posera sans retard tous les rideaux et la portière et on décidera pour la garniture du lit et la tenture du lucoot où il n’y a plus rien à faire pour Marie une fois les anneaux cousus. Je te prie, mon petit homme, de ne pas oublier ce détail quand tu liras ce gribouillis et de faire tout ton possible pour me donner quelques instants demain matin de bonne heure pour prendre un grand parti définitif sur toutes ces choses. Je te fais souvenir en outre qu’il faut monter ta petite pendule bien exactement tous les jours et m’aimer sans RETARD avec la grande et la petite aiguille de votre cœur et de votre âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16384, f. 217
Transcription de Gérard Pouchain

a) « septembre ».

Notes

[1« J’ai retrouvé la copie de mon manuscrit de Shakespeare faite par Julie et Victoire et que j’avais égarée. » (Agenda de Victor Hugo, 10 décembre 1863)

[2Victorine Étasse a été engagée comme copiste pour Les Misérables le 5 octobre 1861.

[3Cette lettre est classée dans le mois de septembre en raison d’une erreur de Juliette.

[4L’éditeur belge, Lacroix, qui publiera l’année suivante William Shakespeare, arrivera le 19 décembre à Guernesey avec l’écrivain et journaliste français Louis Ulbach.

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