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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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15 mars 1836

15 mars [1836], mardi matin, 8 h.

Bonjour, vilain petit homme, vous m’avez fait beaucoup de chagrin ce matin, en dédaignant de prendre le fond de la petite boîte. Il paraît que vous en aviez déjà trop de trois puisque vous avez oublié la quatrième. Cependant celle-là était la meilleure et la plus tendre. Car je m’étais levée une heure plus tôt pour pouvoir vous l’écrire et cependant j’étais bien malade et bien fatiguée. Vous devez sentir la peine que cela m’a fait en la retrouvant à la place où je l’avais mise pour vous. Non pas que je croie que vous vous donnez la peine de lire mes lettres, mais il est dur et affligeant de savoir que vous ne vous donnez même pas la peine de les ramasser. Mon cher méchant homme, comme je ne peux m’exposer vous et moi à la même avanie tous les jours, je ne vous écrirai plus. Sur du papier du moins, car je serai longtemps avant de perdre l’habitude de ne m’occuper que de vous et de rapporter tout mon temps et toutes mes actions à vous.
Comme vous ne lirez pas cette lettre plus que les autres, je vous préviendrai ce soir de ma résolution afin que vous ne soyez pas surpris en ne trouvant plus mes petits morceaux de papier à leur place.
Je vous aime mon Toto, je vous aime quoi que vous fassiez pour m’en empêcher. Je vous aime et je souffre en regardant ma petite boîte en pensant à la répétition d’aujourd’hui.

J.

BnF, Mss, NAF 16326, f. 191-192
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa


15 mars [1836], mardi soir, 8 h. ¾

Je t’aime mon trop bon Toto, j’ai été bien [gibeuleuse ?] aujourd’hui, pardonne-moi, car au fond je t’aime de toutes les forces de mon âme.
Je suis épuisée de fatigue et de mal de tête ce soir. J’ai dîné tant bien que mal avec le fameux bouillon à la suie. Ces demoiselles prétendent qu’il est meilleur parce qu’il est AMER. Je voudrais bien que vous ayez le même goût le jour où votre Juju laisse tomber de la SUIE dans son CARACTÈRE. À propos de caractère, je vais vous dissimuler cette lettre ce soir et nous verrons si vous vous apercevrez de son absence. Il faut enfin que vous soyez pris en flagrant délit d’indifférence. Ceci une fois constaté, je serai la plus triste et la plus malheureuse des femmes, mais enfin je saurai à quoi m’en tenir, c’est une consolation.
Savez-vous, mon cher petit Toto, que je vous aime bien plus que vous ne m’aimez ? Vous êtes plus doux et plus charmant au-dehors, mais je vaux mieux que vous pour le sentiment. Je vous dis cela en passant.
Venez très tôt parce que j’ai à vous baiser très fort sur votre belle bouche.

J.

BnF, Mss, NAF 16326, f. 193-194
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa

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