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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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12 novembre [1844], mardi matin, 8 h. ½

Bonjour, mon petit Toto chéri, bonjour mon cher amour comment que ça va ce matin ? Moi je t’aime et je voudrais te le prouver par les plus tendres caresses et avec les plus douces paroles de la langue humaine. Pauvre adoré bien-aimé, peut-être reposes-tu dans ce moment-ci ? Tu t’es sans doute couché très tard dans la nuit ? Dors, mon doux bien-aimé, je suis auprès de toi en pensée et en désir. J’y vois à peine à t’écrire tant le temps est sombre et couvert. Il n’y a pas de quoi s’en étonner à cette époque de l’année mais nous n’avons eu ni printemps, ni été, ni automne nous ne devrions pas avoir d’hiver pour être conséquent. Je hais ce vilain temps à l’excès surtout à cause de toi, mon Toto chéri, qui es obligé de marcher malgré la pluie le vent et les brouillards. Puisque tu es décidé à te faire faire un pardessus quelconque tu devrais te hâter car voilà le plus vilain et le plus mauvais moment de l’année. Ton paletot est trop hideux pour mettre le jour ce qui t’expose à gagner des fluxions de poitrine ou tout au moins de bons rhumes. Je voudrais savoir que tu as une bonne petite enveloppe bien chaude qui te garantit bien du froid et de l’humidité et je serais plus tranquille.
Je frémis en pensant à l’horrible corvée qui m’attend tout à l’heure. Tu ne peux pas te faire une idée de l’effet que cela me fait. Moi j’aimerais mieux une bonne promenade en voiture avec toi que de fouillasser ces vieilles lettres moisies pendant cinq minutes. Je sais que cela n’est pas vraisemblable mais cela est pourtant. Baise-moi mon cher petit méchant, taquin et vilain monstre ; je te pardonne… pas.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16357, f. 43-44
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette


12 novembre [1844], mardi soir, 4 h.

Je vais me mettre à ta copie mon cher adoré bien-aimé et tu l’auras ce soir. Je ne pouvais pas m’y mettre plus tôt quelque envie que j’en eusse parce que je n’étais pas prévenue d’avance que c’était aujourd’hui jour de ma blanchisseuse et que j’avais mis toutes sortes de choses en l’air qu’il m’a fallu resserrer tant bien que mal enfin m’y voici pour jusqu’à ce que j’aie fini. Quelle douce besogne ! Je voudrais qu’elle ne finît jamais à la condition cependant que cela ne te forceraita pas à travailler toujours. J’avais une peur de chien que la mère Triger ne vînt tantôt mais j’espère que l’heure est passée pour aujourd’hui. Tu étais bien pressé, mon Toto chéri, est-ce qu’on t’attendait chez toi ? Je sais bien que tu travailles, mon cher bien-aimé mais tu avais l’air d’un homme attendu plutôt que d’unb homme occupé. Tu me diras cela quand je te verrai.
J’ai cherché et trouvé, non sans peine, la lettre de ce M. Robert. Je désire que tu n’en aies pas besoin d’autre au même fouillis. Quellec horreur. J’aimerais mieux tout ce qu’il y a de plus désagréable au monde que de chercher une vieille lettre.
Je m’aperçois que votre ravissant petit buste m’empoisonne. Il va falloir que je le mette à la porte pendant quelques jours si je ne veux pas mourir asphyxiéed. Cela me vexe mais je sens qu’il le faut. Je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16357, f. 45-46
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette

a) « forcerais ».
b) une ».
c) « quel ».
d) « asphixiée ».

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