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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 15 août 1858, dimanche matin, 7 h.

Bonjour, toi que j’aime, bonjour, mon bon petit homme, bonjour, je t’adore. Chacun de ces bonjours contient une dose de santé, d’amour et de bonheur pour toi, mon cher bien-aimé. J’espère que tu as passé une bonne nuit et je compte sur une très bonne journée pour toi aujourd’hui. Quant à moi, je commence déjà à m’apprêter pour te bien recevoir, d’autant mieux que Suzanne va à la grand messe en l’honneur du 15 août, ce qui la dispense de tout service ce matin. Je ne m’en plains pas, tant s’en faut, mais cela m’oblige à faire une partie de sa besogne, ce qui me prend du temps. Cher adoré, que de pauvreté et de niaiseries oiseuses je te gribouille tous les jours sous le prétexte de te dire mon amour. J’en suis honteuse, quand j’y pense, et je suis tentée de tout déchirer et de tout jeter au feu afin que tu n’en voies jamais rien, puis je pense que cet expédient ne me rendrait pas plus spirituelle, ni plus aimable pour cela, et que le mieux est de me laisser aller à t’aimer de tout mon cœur et de toute mon âme à quatre pattes comme une bête que je suis. Maintenant, je me dépêche de tourner ma petite meule pour être prête quand tu viendras tantôt.

BnF, Mss, NAF 16379, f. 230
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette


Guernesey, 15 août 1858, dimanche, 7 h. du soir

Que Dieu te garde de tout mal, mon cher adoré, car s’il t’arrivait la moindre chose à la suite de ma confidence, contraire à ta guérison, je ne me le pardonnerais jamais. Je suis tellement habituée à ne te rien cacher d’une part, et d’autre part, le danger imminent d’un affront immérité et odieusement ingrat pour ce brave docteur [1], si bon et si dévoué, que j’ai cru de mon devoir le plus consciencieux de t’instruire de ce qui se passait à ce sujet. Maintenant que tu le sais, mon cher bien-aimé, tu peux réagir sur tous ces esprits injustement irrités avec d’autant plus de certitude et de mesure qu’on ne se doute pas que tu es informé des choses folles qui se passent. Ô mon pauvre bien-aimé, pourvu qu’à force de scrupules et d’amour pour toi et de dévouement sérieux à ta famille, je ne t’aie pas fait du mal aujourd’hui, en voulant empêcher une iniquité qui ne se serait probablement jamais produite. Si tu savais combien cette inquiétude m’est poignante et amère, tu tâcherais de m’en délivrer à force de sérénité et de calme en toi-même, de force et de santé dans tout ton être. Que Dieu te garde de tout mal, mon bien-aimé, car ma vie dépend de ta guérison et de ton bonheur.

BnF, Mss, NAF 16379, f. 231
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette

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