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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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19 août [1844], lundi matin, 9 h. ½

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour, mon bijou, bonjour, le plus beau, le plus charmant, le plus doux et le plus grand et le plus aimé des hommes, bonjour, bonjour, je t’adore.
Je suis honteuse de ma méchanceté d’hier. Je voudrais l’expier et je ne trouve rien de mieux à faire que de t’aimer encore davantage, si c’est possible. Voilà une bien belle journée qui s’annonce aujourd’hui, mon amour, mais, hélas ! nous n’en profiterons pas. Tu travailles, mon cher adoré, je le sais et je ne veux pas te tourmenter. Je veux aussi travailler de mon côté pour me rapprocher de toi par ce point là ; tu sais que je suis ton singe.
Aussi, pendant que tu tireras des pensées sublimes de ta belle petite tête, moi, je tirerai l’aiguille dans mes draps neufs. Cette comparaison mériterait d’être tirée par les cheveux pour lui donner un peu plus de sel. Mais, l’esprit et le style, ça n’est pas ma partie, à moi, je ne sais que t’aimer, t’aimer et puis encore t’aimer. Le reste ne me regarde pas.
Quand te verrai-je, mon cher petit homme adoré ? J’ai déjà bien faim et bien soif de toi. Tâchea de ne pas me faire tirer la langue indéfiniment si tu ne veux pas que je devienne enragée. En attendant, je te baise en pensée et en désir sur toute ta chère petite carcasse adorée.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 69-70
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

a) « tâches ».


19 août [1844], lundi soir, 9 h. ½

Je m’étais mise sous les armes pour vous, mon cher petit bien aimé et vous n’y avez pas fait la moindre attention car vous avez travaillé tout le temps. J’en ai été pour mes frais de coquetterie et de toilette mais je ne les regrette pas car si vous ne m’avez pas regardée, en revanche je vous ai regardé pour deux et je vous ai aimé pour deux mille millions de milliards de cœurs.
Si tu savais, mon pauvre amour, comme la démarche absurde de cette folle de femme m’a tourmentée tantôt [1]. Tant que je ne t’ai pas vu, j’ai été la plus malheureuse des femmes. La pensée que tu étais contrarié suffisait pour me rendre très malheureuse. Aussi, j’en ai contracté un mal de tête qui me dure encore à l’heure qu’il est. Enfin, c’est passé. Tu as été, comme toujours, le plus doux et le meilleur des hommes. Tu es mon pauvre ange bien aimé que j’aime et que j’adore. Je ne te le dirai jamais autant que je le sens.
Jour Toto, jour mon cher petit o. Je vous défends de donner à copier à monsieur Toto. Il a une assez belle spécialité pour les 4, je vous prie de ne pas l’en sortir à mes dépensa. Vous entendez, mon cher petit bien-aimé, ou vous me ferez un véritable chagrin. Je compte sur votre justice comme sur celle du bon Dieu et je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 71-72
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

a) « dépends ».

Notes

[1À élucider.

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