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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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9 octobre [1847], samedi matin, 8 h.

Bonjour, cher adoré, bonjour. Comment vas-tu ou plutôt comment va-t-on chez toi car dans ce moment tout ton être est subordonné à la santé de ta chère malade [1]. Je comprends et je partage ton inquiétude, mon Victor adoré, et je voudrais de toute mon âme t’y soustraire en rendant tout de suite la santé à ta pauvre femme. Tu ne suspectes pas la sincérité de mon dévouement parce que tu connais le fond de mon cœur comme le tien même. Tu sais, qu’à part la jalousie d’amour, tout mon respect et toutes mes sympathies sont pour ta noble et excellente femme. Aussi je ne crains pas de te laisser voir à quel point sa maladie m’affecte et combien je regrette de ne pouvoir pas lui donner mes soins la nuit et le jour. J’attends avec une impatience inexprimable que tu viennes m’en donner des nouvelles. Je suis fâchée que tu n’aies pas consenti hier à me laisser envoyer Joséphine ce matin savoir comment on avait passé la nuit. J’espère que la saignée aura fait bon effet et qu’elle aura diminué la gravité et l’intensité de cette effrayante maladie. Je l’espère et je le désire de toute mon âme et de tout mon cœur mais je serai bien tourmentée jusqu’à ce que je t’aie vu. Mon pauvre adoré, mon cher bien-aimé en quoi puis-je t’être bonne ? Que puis-je faire pour diminuer tes inquiétudes ? Si tu sais quelque chose dis-le moi et je mettrai mon orgueil et ma joie à le faire. Un des côtés douloureux et décourageants de ma position c’est de ne pouvoir me dévouer à toi corps et âme et en toute occasion.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16365, f. 224-225
Transcription de Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
[Souchon, Massin]


9 octobre [1847], samedi, midi ¾

Je regrette plus que jamais, mon Victor, que tu ne m’aies pas permis d’envoyer Joséphine ce matin savoir des nouvelles de la nuit car je me tourmente et je m’impatiente outre mesure. Cependant j’espère que la saignée aura beaucoup soulagé la tête et que tout danger aura disparu mais je ne serai tranquille que lorsque j’en serai sûre. En attendant ma pensée va de chez moi à la place Royale et de la place Royale ici, se fatiguant à tâcher de deviner ce qui se passe et ne parvenant qu’à me rendre encore plus triste et plus malheureuse. Mais toi, mon pauvre bien-aimé, mais ta chère Dédé et tous tes enfants que devenez-vous ? Que faites-vous ? Si j’avais prévu combien l’ignorance de ce qui se passe chez toi m’est insupportable je n’y aurais pas consenti. Maintenant Dieu sait quand tu pourras venir. Pourvu que tout aillea bien, mon Dieu, je ne me plaindrai pas de toutes ces longues heures d’angoisses. Tâche de venir le plus tôt que tu pourras mon pauvre doux bien-aimé, je t’en serai bien reconnaissante. En attendant je suis avec toi et je t’assiste dans toutes tes douloureuses épreuves avec le cœur et avec l’âme. Je t’aime, mon Victor.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16365, f. 226-227
Transcription de Yves Debroise assisté de Florence Naugrette

a) « ailles »

Notes

[1Après François-Victor, c’est Mme Hugo qui souffre de la fièvre typhoïde.

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