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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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11 août [1847], mercredi matin, 7 h.

Bonjour, bien-aimé, bonjour, heureux père, bonjour, le plus digne de ton bonheur, bonjour, le plus adoré et le plus admiré des hommes, bonjour mon grand Victor. Je te remercie d’être venu tout de suite m’annoncer la bonne nouvelle [1] ; cette délicate attention me l’a rendue deux fois plus chère. Merci, mon adoré, merci, mon bien-aimé, merci du fond du cœur et de l’âme. Je vais aller à la messe tout à l’heure mais avant j’ai voulu t’écrire. Il me semble que ma prière monte mieux vers Dieu quand je l’ai fait précéder de ta chère pensée.
Tantôt j’irai au cimetièrea [2]. Je compte partir de 1 h. à 2 h. et être de retour de 3 à 4. J’irai et je viendrai en omnibus parce que la course est trop longue pour moi surtout par le soleil. Enfin je serai de retour pour quand tu seras là à moins que, par impossible, tu ne viennes beaucoup plus tôt que d’habitude. Dans ce cas-là je te prierais de m’attendre. Suzanne te donnera tout ce qu’il te faut pour travailler. Mon Victor, mon aimé, ma vie, mon âme, je pense à toi toujours et je t’aime toujours davantage. Ce n’est pas une manière de parler c’est la vraie et sainte vérité.

Juliette

MVH, α 8990
Transcription de Nicole Savy

a) « cimetierre ».


11 août [1847], mercredi, midi ¾

Tu connais ma manie de ne pas vouloir sortir de chez moi sans t’avoir donné mon contingent d’amour et de tendresse ? C’est une idée que j’ai comme cela. Il me semble que s’il m’arrivait malheur en route, je ne me pardonnerais pas de ne t’avoir pasa laissé une dernière marque de tendresse. C’est peut-être puérilb mais c’est en même temps bien tendre.
Je me dépêche de faire mes affaires pour être revenue plus tôt, afin de ne pas manquer une seconde des trop courts instants que tu pourras me donner tantôt. Je te promets d’être bien raisonnable et de ne pas m’appesantir sur des regrets sans issue. Je tâcherai de me souvenir de toutes les bonnes et pieuses consolations que tu m’as données afin de n’avoir que de douces pensées et de calme résignation devant la tombe de cette pauvre chère ange. Je la prierai de prier pour nous et surtout pour toi dont le bonheur m’est plus précieux que la vie. De ton côté, mon Victor, pense à moi et aime-moi. Je le sentirai malgré la distance et j’en éprouverai un grand soulagement et un grand bonheur. En attendant que je revoie ton beau visage aimé, je te baise de l’âme et je souris à ta joie et à la joie de tous les tiens. Soyez bénis tous.

Juliette

MVH, α 8991
Transcription de Nicole Savy

a) « pas » répété en haut de la page suivante.
b) « puérile ».

Notes

[1La bonne nouvelle pour l’heureux père doit être le double accessit de latin et de français obtenu par son fils François-Victor au concours général.

[2Juliette va à Saint-Mandé, sur la tombe de sa fille Claire.

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