Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1838 > Juin > 1

1er juin 1838

1er juin [1838], vendredi après-midi 2 h. ½

Nous avons bien commencé le mois, mon amour, il faut le continuer de même. Il ne dépendra pas de moi qu’il n’en soit ainsi car je vous aime, car je vous demande, car je vous attends, car je vous désire. Je viens de faire mes comptes de la fin du mois, opération des plus ennuyeusesa et des plus taquinantes car j’ai beau y apporter toute mon attention et toute ma probité, je me trouve toujours en déficit avec ma caisse, aujourd’hui j’en suis pour 6 F. 14 s. ½. Mais comme je ne peux pas continuer à en mettre de MA POCHE, vous trouverez bon que je me démette de mes fonctions d’ÉCONOME, de CAISSIÈRE ET AUTRES. Je n’ai pas besoin, moi, de me ruiner à tenir notre MAISON. J’ai mal à la tête. Je bisque, je rage et je vous aime, ce qui est dans l’ordre. Je n’ai pas encore fait ma toilette parce que j’ai voulu me débarrasser de mes comptes tout de suite. Je suis à vos ordres maintenant à pied et à cheval. Cet homme qui passe me paraît bellum [1]. Je ne m’étais pas trompée car c’était vous. PHAME. Maintenant ne soyez pas 15 jours sans revenir, je compte les instants, je vous aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 216-217
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « ennuieuses ».


1er juin [1838], vendredi soir, 6 h. ½

Le temps est bien menaçant, mon petit homme, et vous devriez bien songer à venir vous abriter dans ma maison. Depuis tantôt je travaille à ma table de nuit en vous attendant. Ma vertu a besoin d’être récompensée ou bien je ne vais plus être vertueuse. Vous auriez dû souper avec moi ce soir si vous aviez eu pour deux liards de cœur. Avec ça que j’ai toujours mon idée à l’endroit de votre habit que vous aviez hier et que vous n’avez pas aujourd’hui, et tout cela sous des prétextes qui ne me paraissent pas clairs. Je ne ris que d’une joue et on ne sait pas laquelle car je crois que je suis trahie. Encore si vous veniez plus souvent et plus longtemps je pourrais douter, mais vous ne vous donnez pas la moindre peine pour me faire croire que vous m’êtes fidèle et que vous m’aimez. Je sais bien que vous êtes venu ce matin et que c’était bien bon, mais si vous étiez venu à présent et ce soir ce serait encore meilleur et c’est ainsi que vous en usiez autrefois. Si j’étais à votre place je ne vous quitterais pas, vous pouvez en être sûr car je vous aime, moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 218-219
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

Notes

[1Jeu de mots sur « parabellum » et « paraît bel homme ».

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne