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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 juillet [1846], samedi après-midi, 4 h. ½

J’ai le cœur gros et triste, mon doux adoré, parce que je ne t’ai pas assez vu et parce que je n’espère pas te voir de si tôt. J’ai beau me faire une joie anticipée en pensant au charmant petit projet dont tu m’as parlé tantôt [1], je n’y parviens pas. Je sais trop quelle distance il y a entre le projet et l’exécution pour me réjouir d’avance. Je suis de nature à préférer deux bons tiens qu’un tu l’auras.......a pas. Aussi je suis souvent à court de bonheur et d’illusion. Ce n’est pas de ma faute mais c’est ainsi. Eugénie est venue ce matin faire ma commission et puis elle s’en est allée parce qu’elle avait à faireb chez elle. La chose a coûté 82 F. 17 sous. Maintenant nous serons tranquilles de ce côté-là jusqu’au mois de septembre prochain. Je voudrais, pour je ne sais quoi, n’avoir plus de ces hideux papiers chez moi. Rien ne me répugne plus que la vue de ces paperasses. J’en suis humiliée au dernier point. Mon petit Toto chéri, si tu veux me faire sortir ce soir, je me tiendrai prête. Je t’attendrai aussi tard que tu voudras. J’ai tant besoin de te voir que je cherche tous les moyens possibles de rester quelques minutes avec toi. Malheureusement, mes ressources sont très bornées. Ton travail continu est un obstacle à tous mes désirs. Je ne t’accuse pas mais je suis triste, triste dans le fond de l’âme. Je me trouve si parfaitement inutile sur la terre que le découragement de la vie me prend souvent. Je ne devrais pas te dire cela, mon doux adoré, je le sens sans pouvoir m’en empêcher. Je t’en demande pardon et je te souris du fond de mon pauvre cœur malade pour que tu voiesc bien que je ne t’en veux pas. Je t’envoie toutes mes pensées les plus tendres et tous mes baisers les plus passionnés. Je t’attends et je te désire autant que je t’aime. Tâche de venir bien vite et je serai bien contente et bien heureuse, de triste et d’accablée que je suis en ce moment. D’ici-là, je t’aime et je pense à toi sans interruption.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16363, f. 247-248
Transcription de Marion Andrieux assistée de Florence Naugrette

a) Sept points de suspension.
b) « affaire ».
c) « vois ».

Notes

[1Ils partiront en excursion le samedi 1er et le dimanche 2 août.

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