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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 mai 1836

13 mai [1836], vendredi matin, 7 h. ¾

Bonjour, vilain et très méchant petit homme, vous êtes joliment venu cette nuit, c’est pour le chat [1]. Je suis très furieuse contre vous et il y a déjà longtemps que je vous l’aurais écrit si je n’avais pas été forcée d’attendre l’arrivée de ma bonne pour l’envoyer chercher du papier à lettres.
Comment allez-vous, comment vont vos bobos ? J’espère que vous viendrez vous faire panser de bonne heure et que vous ne voudrez pas joindre à tous les griefs que j’ai contre vous celui de vous faire couper la cuisse.
Dire que je vous aime de plus en plus fort : c’est vraiment bien malheureux, puis vous faites vous de votre côté précisément le contraire. Mais je ne peux pas m’en empêcher. Il faut que je vous aime comme cela tant que je vivrai en corps et en âme. C’est pas ma faute.
Quel temps ravissant. Il me rappelle la délicieuse matinée que nous avons employéea à courir ensemble l’Académie que nous avons bien plus attrapée cette fois en ne bougeant pas. Vous remarquerez, mon cher petit Toto, que le nous de la servante du curé est une locution qui me vient naturellement et qu’il me serait gênant de la changer. Il n’y a que lorsque je dis que je vous aime que je suis personnelle. Je t’aime, je vous aime. Je t’adore, je vous admire.

BnF, Mss, NAF 16327, f. 47-48
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « emploiées ».


13 mai [1836], vendredi soir, 8 h. ½

Cher bien-aimé, vous n’êtes pas revenu et je n’ai pas le courage de vous en vouloir car je sais que vous travaillez. Cependant j’éprouve le désir de vous voir au plus haut point. Je vous aime plus que je ne vous ai jamais aimé, et je vous trouvais bien aveugle de ne pas vous en apercevoira tantôt, malgré la rage de tête que j’avais dans ce moment-là.
Oh ! oui je t’aime, mon cher adoré, je n’ai pas de mot assez fort pour t’en donner une idée, je n’ai pas assez d’esprit pour t’en donner une image quelconque mais que je t’aime !
Je vais me coucher en t’attendant. Je n’ose pas espérer que tu viendras bientôt parce que le désappointement en amour ne m’est pas facile à supporter.
La propriétaire a consenti à 120 F. Je crois que nous avons fait un bon marché car il est certain que tout seb serait perdu là-bas en très peu de temps et puis nous avons la bonne sous la main, ce qui en cas de maladie ou d’accident n’est pas à dédaigner. Il est possible que nous puissions entrer d’ici à lundi en jouissance de la chambre mais ce n’est pas encore très sûr [2].
Mais mon pauvre ange, je t’aime, voilà la seule, la grande, la bonne nouvelle. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16327, f. 49-50
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « appercevoir ».
b) « ce ».

Notes

[1À élucider.

[2Le 8 mars, Juliette a emménagé au 14 rue Sainte-Anastase. Cherche-t-elle à y louer une chambre pour sa bonne ?

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