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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 décembre [1837], jeudi midi

Bonjour mon petit homme adoré, bonjour. Comment vont tes yeux et toute ta chère petite personne ? Tu les avais bien malades cette nuit tes pauvres yeux, et tu paraissais bien fatigué. Je crains que tout cela à la longue ne t’empêche de m’aimer, aussi je voudrais au prix de ma vie gagner assez d’argent pour que tu n’aiesa plus cette pénible tâche à accomplir toutes les nuits. Je t’aime, va. Je souffre quand je sens que je suis un fardeau pour toi. Ô mon pauvre adoré, quand donc n’aurai-jeb à te demander que de l’amour ? Ce jour-là je serai bien heureuse car tu n’auras plus d’autre souci que de me rendre heureuse tandis qu’à présent la nécessité de me donner du pain t’occupe jour et nuit.
Je t’aime mon Toto. J’ai encore rêvé de toi et avec tristesse, mais cette fois ce n’était pas ta faute au contraire car tu m’as défendue à tes risques et périls et c’était bien consolant et bien doux pour moi.
Tous les matins je vous adresse ma petite oraison dominicale, mon cher petit Dieu, avec une ferveur et une foi en vous qui rendrait jaloux celui du ciel si Dieu pouvait être jaloux.
Je vous attends de toutes mes forces et je baise vos pieds de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16332, f. 220-221
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein

a) « ai ».
b) Ce mot est suivi de « qu’ », redondant.


28 décembre [1837], jeudi soir, 8 h. ¾

Je pense à toi mon adoré. C’est comme si je te disais mon Toto je vis, je respire, je t’aime avec tout mon cœur. Aime-moi un peu, j’en ai bien besoin. Ma santé, ma vie en dépendent. Quelle joie ce serait pour moi si tu pouvais me donner une bonne soirée entière pour très tôt. Il me semble que je rajeunirais de quatre ans [1]. Il me semble que je reviendrais à ce bon temps où tu m’aimais, où tu me le prouvais. Ô si tu pouvais, dis, comme nous emploierions bien cette soirée-là. Il me semble que j’y suis déjà. QUEL BONHEUR ! Mais tu ne voudras pas car tu n’es plus amoureux de moi, c’est bien sûr. Je ne veux pas trop me le dire dans la crainte d’y croire trop à ce refroidissement. Je suis déjà bien assez malheureuse sans ça.
J’ai dîné avec Mme Pierceau. J’espère que ce dîner me passera car il a été léger. Soir pa. Soir man. Je t’aime. Je voudrais être dans ta pensée comme tu es dans la mienne. Je serais plus tranquille et plus heureuse. Je voudrais bien te baiser autrement qu’en idées. J’ai faim et soif de vous.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16332, f. 222-223
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein

Notes

[1Juliette et Victor se sont rencontrés en 1833, quatre ans plus tôt.

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