24 décembre 1877

Paris, 24 décembre [18]77, lundi soir, 4 h.

Cher bien-aimé, nous épuisons en ce moment toutes les petites vilénies de la saison et aussi (espérons-le, au risque de mésuser de ce vieux cliché) les dernières malpropretés de la politique. Quant à celles des sots et des méchants, elles se renouvellent d’elles-mêmes jour à jour et comme les mondes elles n’ont ni commencement ni fin. C’est à prendre ou à laisser. Je laisse. M^me Lockroy vient de me faire demander les noms de tes hôtes ce soir et je les lui ai gracieusement envoyés au risque de provoquer son abstention discourtoise.

Maintenant il faut que j’aborde une des difficultés de ma vie qui n’est pas la moindre, celle de l’argent. Tu m’as donné 130 F. Ce matin pour payer d’une part à la cuisinière ………………………………………………………………90 F. 45
d’autre part le blanchissage……………………………………………………54 F. 20
Total……………………………………………………………………………… 144 F. 65
Il est vrai que j’ai par devers moi en menue monnaie……………………16 F. 50
et pour toi en monnaie républicaine………………………………………… 25 F.
Total…………………………………………………………………………………41 F. 50
insuffisants d’ailleurs pour faire la dépense d’aujourd’hui. D’autre part, j’ai à payer pour moi personnellement
un chapeau…………………………………………………………………………30 F.
réparation de mes robes d’hiver………………………………………………39 F. 75
bonnets remontés………………………………………………………………… 9 F. 90
total………………………………………………………………………………… 79 F. 65

Maintenant, mon cher bien-aimé, que j’ai achevé cette maussade réclamation, je te donne sans compter mon cœur et mon âme tout pleins de toi.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 347
Transcription de Guy Rosa