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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Paris, 2 décembre [18]77, dim[anche] soir, 4 h. ½

Cher bien-aimé, aujourd’hui, comme il y a vingt-six ans, la pauvre France est en proie aux mêmes malfaiteurs et je te retrouve, lutteur infatigable, sur la même brèche et j’ai au cœur le même amour, la même vénération, la même vénération, la même admiration pour toi qu’il y a vingt-six ans. Et comme il y a vingt-six ans, je me sens capable de tous les courages et de tous les dévouements, y compris celui de mourir pour toi. Mais je doute que ce bonheur me soit donné encore cette fois-ci tant les misérables conspirateurs du coup d’État d’aujourd’hui me semblent chétifs pour un tel crime. Je crois qu’ils se borneront à la parodie de la lugubre tragédie de 1851 [1]. C’est bien assez, c’est même beaucoup trop pour notre pauvre pays que ce spectacle ruineux et humiliant dont il fait tous les frais. J’espère que nous touchons à un prochain et joyeux dénouement. En attendant, mon grand bien-aimé, soyons prêts à tout événement et serrons-nous au plus près du cœur l’un de l’autre.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 326
Transcription de Guy Rosa
[Guimbaud, Souchon]

Notes

[1Les inquiétudes de Juliette ne sont pas tout-à-fait sans fondement. Hugo note le même jour : « Voici l’anniversaire. On dirait qu’il va être célébré par lui-même et que le crime est à son poste pour recommencer. Le premier ministre est La Roche-Bouet, un des mitrailleurs du boulevard Montmartre. [Exact : la Légion d’honneur récompensa immédiatement son zèle.]
Depuis trois jours le temps m’a manqué pour écrire ce petit memento quotidien. Les choses sont étrangement obscures. Hier soir, une lettre anonyme m’a prévenu que je serais arrêté, et peut-être assassiné, dans la nuit. Je n’en ai pas moins dormi paisiblement. Cela regardait mes assassins. »

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