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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 janvier [1842], mardi midi ¾

Bonjour mon cher bien-aimé, bonjour mon cher petit homme. Comment va ton bobo ? Je t’aime, mon Toto chéri. Et toi, m’aimes-tu ? Je me suis réveillée plusieurs fois cette nuit en rêvant que tu étais près de moi et je cherchais tes petits pieds avec les miens, et ne les trouvant pas, j’étais triste et je pensais que peut-être tu travaillais dans ta chambre sans feu, malgré ton petit échauffement et la fatigue de tes beaux yeux. J’aurais voulu pouvoir aller te trouver et te réchauffer dans mes bras et fermer tes yeux adorés avec mes lèvres. Pauvre bien-aimé courageux et dévoué, je t’aime avec admiration, avec vénération et avec adoration. Tu es mon beau, ravissant et sublime bien-aimé.
Il fait encore bien mauvais aujourd’hui, mon toto. Tâche de ne pas glisser et de ne pas avoir tes petits pieds mouillés. Si je pouvais, je te préparerais tes beuttes mais je crains d’en faire des BAUTTES et que ta coquetterie légitime à cet endroit ne me sache aucun gré de mon attention délicate. Mais je te prie en grâce de ne pas te mouiller les pieds parce que ce serait dangereux avec ton échauffement. Tâche aussi de venir bien vite me voir, tu le peux en allant à l’académie, si tu vas à l’académie, ce que je ne te conseille pas ; j’ai le plus grand besoin de te voir mais je ne veux pas que ce soit aux dépensa de ta santé, qui est ma vie à moi. Si tu sors, viens me voir, si tu restesb, pense à moi et aime-moi. Je te le rendrai que de reste. En attendant, je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16348, f. 73-74
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette

a) « au dépend ».
b) « reste ».


25 janvier [1842], mardi soir, 5 h.

Prends bien garde à toi, mon pauvre bien-aimé, par l’affreux temps qu’il fait et avec l’extrême préoccupation à laquelle tu es [en] proie. Je ne suis pas tranquille : quel malheur que tu ne puissesa pas travailler assis près du feu, ma joie, mon bonheur serait d’être auprès de toi, aussi muette et aussi immobile que tu le voudrais, mais je serais bienheureuse et bien tranquille. Quand te verrai-je, mon cher bien-aimé ? Toujours trop tard, mais je voudrais bien que ce soit avant minuit. Quel malheur que je ne sois pas un garçon. Avec quelle joie je me mettrais à ton service. Maintenant, j’ai beau faire, je ne peux pas te soigner comme je l’entends et comme il le faudrait. Pour cela, il faudrait que nous ne fussions pas si gênés et que je puisse avoir une ouvrière régulièrement deux jours par semaine. En attendant, pauvre ange, tu n’as pas toujours ce qu’il te faut, et tu es obligé de te préoccuper de niaiseries qui te fatiguent mal à propos, et qui te dérangent de ton travail. Mais qu’y faire ? Faire comme toi, se résigner avec une patience et une douceur d’ange, et attendre. C’est ce que je fais de mon mieux, mais je n’y réussis pas toujours, surtout quand il s’agit de toi. Cela ne vous empêche pas d’être bien gentil et d’avoir la plus jolie farimousse du monde. Prenez garde à vous, baisez-moi, aimez-moi et ne soyez pas trop longtemps sans revenir.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16348, f. 75-76
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette

a) « puisse ». 

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