24 août 1860

Guernesey, 24 août 1860, vendredi matin, 7 h. ½

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour, ma joie, bonjour, mon bonheur, bonjour mon tout, mon moi, mon amour. Comment as-tu passé la nuit, mon cher petit homme ? Aussi bien que moi je l’espère qui a dormi toute la nuit comme un sabot. Du reste je suis bien contente d’avoir presque fini mon vinaigre. J’en ai encore 2 bouteilles à décanter puis c’est tout. J’ai eu le courage hier de m’y dévouer toute entière sans même prendre le temps de me faire ma bonne petite restitus mais il le fallait et peut-être ne t’en es-tu pas plaint ? [Eh ? Ah ? Oh ?] ! Que je vous VOUEILLE me dire que oui et je vous ficherai des bons coups. En attendant, VILAIN SÂLE, c’est vous qui faites tous ces pâtés sur mon papier et par économie je les fais gober par ma restitus au risque de l’étouffer. Dites donc vous ? Il me semble que j’ai beaucoup gagné au loto hier ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Répondez si vous l’osez. J’ai bien peur d’avoir perdu pour plus de 13 sous de votre fidélité hier au soir. Est-ce que cette madame Hettier ou Hittier [1] est vraiment assez sorcière pour vous avoir séduit du premier coup... de table ? Ou bien est ce dans votre Harem de passage que vous avez laisser choir votre cœur comme le mouchoir d’ OSCAR ? Je vous somme de me le dire toute franchise pour que je puisse établir la balance de mon gain et de ma perte. En attendant je vous aime COMPTANT et rubis sur l’ongle et sans discompte.

Juju

BnF, Mss, NAF 16381, f. 221
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette