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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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26 juillet [1839], vendredi matin, 10 h.

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour mon petit homme. Comment te portes-tu ce matin ? Tu travailles comme un pauvre loup et moi je ne fais que t’aimer, c’est plus doux et moins fatiganta. Mais Dieu sait que je voudrais pouvoir t’aider, ce serait avec joie. J’ai chez moi l’accordeur de piano qui m’a proposé, comme le précédent, une petite réparation, mais j’ai été insensible. Je lâche l’accord tous les quatre ans, c’est tout ce que je peux faire, mes moyens ne me permettant pas de dépenser davantage pour la musique. Je commence aujourd’hui même mon petit travail de surveillance et d’économie, nous verrons ce que ça donnera au bout d’un mois. Jour mon cher petit o. Je vais travailler à ménager tes pauvres yeux. Baise-moi, mon amour, mieur que ça… encore. Toujours. Le temps est frais aujourd’hui et presque froid, tu ferais bien de prendre quelque précaution comme de ne pas rester entre deux airs et de ne pas aller à la gouttière. Je ne suis jamais tranquille quand vous n’êtes pas avec moi. Ça m’arrive souvent, n’est-ce pas, mon pauvre petit homme ? Ça prouve que vous êtes toujours là où vous n’êtes pas adoré et attendu comme chez moi. Taisez-vous et tâchez de me faire sortir À PIED ce soir. Ça fera du bien à ma tête et à notre bourse. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16339, f. 157-158
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « fatiguant ».


26 juillet [1839], vendredi soir, 7 h. ¾

Je suis encore toute imprégnée des senteurs et des souvenirs de nos premiers beaux jours d’amour, mon Toto, et j’y ai éprouvé tout le bonheur qu’un avare aurait en contemplant le premier sou de son immense trésor : dans le mien, rien n’a perdu de sa valeur ; rubans fanés, fleurs desséchéesa, papiers froissés, tout est frais, tout embaume, tout parle le langage passionné de l’amour. Je ne donnerai pas un seul de tes cheveux adorés pour toutes les richesses de ce monde, pas un mot de ta main pour toutes les merveilles de la terre. Je t’aime mon cher adoré. Je vais continuer à mettre de l’ordre dans mes chères petites archives d’amour, après je t’attendrai, sinonb avec patience, du moins avec courage et résignation.
Il pleut très fort et cela me contrarie car je sais que tu erres malgré la pluie et le vent, et peut-être le parapluie sous le bras ? Encore si je pouvais marcher à côté de toi, je te couvrirais, fût-cec avec mon jupon et tu ne serais pas mouillé jamais. Voici la couturière qui arrive. Je l’attendais hier. Je veux profiter du jour et j’interrompsd ici ma lettre à cause de cela. Je finis ma lettre derrière toi, mon adoré, et je vais me coucher tout de suite sans m’être même débarbouillée tant je suis fatiguée. Je t’aime, tâche de revenir cette nuit.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16339, f. 159-160
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « desséchés ».
b) « si non ».
c) « fusse ».
d) « j’interrompts ».

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