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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 novembre [1840], mardi soir, 5 h.

Tâchez, mon bon petit homme, si vous allez chez des FEMMES ce soir de bien vous y conduire car j’ai l’œil ouvert sur vous et je vous préviens, qu’à votre insua, je flanquerai des gifles à la susdite femelle à chaque compliment que vous lui ferez ce qui ne vous réussira guèreb comme vous voyez. Jour Toto. Jour mon petit o. Je ne veux pas du tout que vous ayez de jolies femmes de chambre. Je veux même que vous ayez tout le contraire. Je l’exige impérieusement. Tâchez de ne pas prendre le change si vous tenez à la vie. En attendant vous devriez bien venir me baiser, il y a déjà bien près d’un siècle que je ne vous ai vu. Je voudrais aussi que vous tâchassiez de me faire sortir un de ces jours. Voici bientôt un mois que je n’ai pris l’air et cela me fait mal bien sérieusement. J’ai encore vomi tout mon déjeuner tantôt et je suis bien sûre que le défaut d’air et d’exercice y est pour quelque chose. Il me semble qu’il était convenu que nous irions nous promener souvent et dans nos anciennes promenades ? Est-ce que tu as changé d’avis ? C’était pourtant bien charmant et bien doux et j’aurais, pour ma part, été bien heureuse de revoir tous nos petits coins où nous avons laissé tant d’amour. J’espère encore que tu n’as pas renoncé à ce ravissant projet et que tu le mettras bientôt à exécution. Mais le temps se passe, mais la tête souffre, mais les jambes s’engourdissent, mais les cheveux blanchissent et j’attends toujours. Enfin quand tu voudras je suis toujours prête à être heureuse. Je t’aime mon Toto. Je vous adore mon petit homme.
À qui donc avez-vous écrit pendant que je faisais votre tisaneb ? J’ai trouvé mon buvard plein de pain à cacheter ce qui j’espère est un INDICE SUFFISANT. Il faudra pourtant que je m’en rapporte à vous, dans tous les cas, puisque vous avez eu la scélératesse d’emporter la lettre ou LES LETTRES. Heim ? Si j’en faisais autant, moi, vous m’avaleriez toutc entière. Il est vrai que je me laisserais faire car je m’aimerais mieux dans vous que dans moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF, 16343, f. 181-182
Transcription de Chantal Brière

a) « insçu ».
b) « tisanne ».
c) « toute ».

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