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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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1er février 1852

Bruxelles, 1er février 1852, dimanche soir, 4 h. ½

Cette fois c’est sans aucun espoir de te posséder encore cette nuit, mon pauvre doux bien-aimé, que je t’écris ces quelques lignes que je m’efforce de rendre courageuses et résignées, et dignes enfin de toute la bonté que tu as eue envers moi et des trois semaines de bonheur que tu m’as données. Tu as reçu une lettre de Paris, probablement de ta famille, et t’annonçant l’arrivée de ton Charles [1]. Tu me le diras tout à l’heure. Je pense que s’il devait arriver ce soir tu aurais trouvé moyen de me le faire savoir afin que j’aie le temps de me préparer à la triste déception de ne pas dîner avec toi. Aussi je livre mon cœur à l’espérance de passer encore cette soirée avec toi, quel bonheur ! Mon pauvre bien-aimé, je veux te sourire jusqu’au bout ; pour cela il ne faut pas que je songe à la nuit prochaine. Je me suis occupée de ton déménagement. Tu auras le constat demain. On pense que tout pourra être terminé dans la journée mais dans le cas où cela ne se pourrait pas on te le prêteraita encore mardi. Je n’ai pas encore parlé de l’affaire de la servante, mais je vais y descendre tout à l’heure et m’entendre à ce sujet avec Mme Luthereau. Nous nous sommes occupéesb tantôt des inconvénients qu’il y auraitc à ce que Mlle [2] aille demeurer chez moi et des moyens de la détourner de cette idée sans la blesser. J’espère que j’y parviendrai surtout si tu m’y aides par quelques mots dits à propos. En attendant, mon adoré bien-aimé, je pense à l’arrivée de ton cher fils et au bonheur doux et triste que tu vas avoir en reprenant possession d’un morceau de cette noble, généreuse et charmante famille. Oh ! S’il dépendait de moi de te les rendre tous, depuis les plus doux jusqu’aux plus fiers et aux plus dignes, depuis ta ravissante fille jusqu’à ta sainte femme, avec quelle joie avec quelled ardeur je m’y dévouerais jusqu’à la dernière goutte de mon sang, jusqu’à mon dernier souffle. Tu en es bien sûr n’est-ce-pas mon adoré. Oh ! C’est que je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16370, f. 51-52
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « prêterais ».
b) « occupés ».
c) « auraient ».
d) « quel ».

Notes

[1En 1848, Charles et François-Victor Hugo, en association avec Auguste Vacquerie et Paul Meurice fondent le journal L’Événement dont la devise est la suivante : « haine profonde de l’anarchie, tendre et profond amour du peuple ». En 1851, alors que L’Evénement est censuré, puis interdit, les fondateurs du journal sont emprisonnés. Charles est libéré de La Conciergerie le 28 janvier et rejoint son père à Bruxelles le 3 février 1852.

[2Mlle : à élucider.

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