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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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2 mai [1839], jeudi midi

Bonjour, cher petit bien-aimé, bonjour mon adoré, je ne m’étonne pas que j’étais si souffrante hier au soir. Il paraît qu’aussitôt après que nous avons été rentrés il a plu beaucoup. Je crains même que tu n’aies été mouillé. Au reste, j’ai grondé Claire, qui ne dormait pas lorsque tu es parti, de ne t’avoir pas averti. Tu vois, mon Toto, qu’il faut se défier du sommeil de cette demoiselle car il n’est rien moins que sûr. Quand la chambre sera faite, nous aurons un paravent et elle couchera derrière, ce qui sera beaucoup plus commode. Je voulais ne vous écrire qu’après mon déjeuner, pour pouvoir dîner de bonne heure tantôt et être plus tôta prête, mais je n’ai pas pu, j’aurais mal déjeûné si je ne vous avais pas dit mon petit bénédicité d’amour. J’espère que je suis assez dévote à mon petit Dieu ? C’est que pour moi vous l’êtes, mon Toto, un Dieu. Je vous aime, je vous adore, je vous vénère. Je voudrais coucher avec vous et baiser vos pieds. Voilà ma profession de foi. Tâchez, mon petit homme de vous humaniser bientôt et de me donner le premier de mes désirs, le second viendra par la même occasion. Je vous aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 119-120
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) plutôt


2 mai [1839], jeudi soir, 5 h. ¾

Voici bientôt l’heure où vous allez venir, mon Toto, et nous sommes sous les armes, ce n’est pas sans peignes ni sans peines car je souffre horriblement des reins. Heureusement que ce n’est pas loin et qu’il n’y aura qu’à s’asseoir. J’aurais cependant mieux aimé voir Lucrèce [1] et faire six heures à pied ce soir mais Dieu sait que vous ne voulez jamais me faire un plaisir entier. Papa est bien i. Il a fait un temps ravissant aujourd’hui et j’ai bien regretté de n’être pas prête quand vous êtes venu nous chercher. Les petites Bensancenot sont venues mais, ma foi, je ne leur ai rien dit, d’ailleurs il fait trop chaud pour se charger d’un si gros tas de marmailles. C’est demain matin que Claire s’en va, ainsi, mon Toto, vous pouvez venir déjeuner sans crainte. Baisez-moi, aimez-moi et chérissez-moi car je vous le rendsa au centuple et encore plus. Je suis cependant bien en colère contre vous et il y a bien de quoi puisque vous ne venez plus faire l’amour et vous ne me menez jamais voir vos pièces, toutes espèces de méchancetésb qui devraient me guérir de la manie de vous aimer comme une folle que je suis.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 121-122
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « rend ».
b) « méchanceté ».

Notes

[1Reprise de Lucrèce Borgia.

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