19 novembre 1879

Paris, 19 nov[embre] [18]79, mercredi matin, 8 h.

Bonjour, mon grand petit homme, bonjour, je t’aime ! J’espère que ta nuit n’a rien à envier^a à la mienne qui a été excellente de tout point. J’irai tout à l’heure m’en assurer en te portant mon gribouillis. Je viens de donner, en ton nom et au mien, le déjeuner à mes chers petits pauvres du bon Dieu, les MOINIAUX [1].
La Société des amis des Muses d’Évreux t’envoie et te prie d’en accepter la présidence d’honneur. À cette lettre est adjoint le programme de la soirée littéraire et musicale qu’elle a donnée le 16 de ce mois dans laquelle on a dit « Le Revenant » [2] et « Les Pauvres Gens » [3]. Tu vois, mon cher bien-aimé, que ton grand cœur et que ton sublime génie sont plus que jamais à l’ordre du jour et le régal de toutes les fêtes de l’esprit et de la charité.
Il paraît, mon doux adoré, que ma confiance anticipée dans l’excellence de ta nuit n’est pas aussi justifiée que je le croyais puisque Mariette t’a entendu t’agiter et te plaindre plusieurs fois. Peut-être travailles-tu trop ? Je vais aller savoir de toi-même si tu n’es pas rendormi, comme c’est probable, ce qui a pu troubler ton sommeil. Dès que j’aurai clos ma chère petite restitus par les mots sacramentels de mon cœur et de mon âme : je t’aime ! Je t’adore !

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16400, f. 280
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette

a) « envié ».