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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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29 mars 1838

29 mars [1838], jeudi matin, 11 h.

Bonjour mon cher petit homme, bonjour mon bien-aimé. J’ouvre les yeux tant que je peux pour voir Claire et t’écrire car je suis presque aveugle ce matin et de plus j’ai un mal de tête excessif. Je n’ose pas te demander des nouvelles de tes chers beaux yeux parce que je prévois trop qu’ils ont encore passé cette nuit, ce qui doit bien les arranger dans l’état où ils sont. Je me tais pour n’avoir pas l’air d’une femme sensible en paroles, ces choses-là, quand on ne peut pas les empêcher, il vaut mieux n’avoir pas l’air de s’en apercevoira que de s’exposer à n’être pas comprise de l’homme qu’on plaint et qu’on adore.
J’aurai ma petite loge ce soir, n’est-ce pas ? J’irai avec Suzette à son grand déplaisir mais je m’en moque. Son amoureux rattrapera le temps perdu demain ou un autre jour, ça m’est égal, pourvu que je voieb ma Marion. Je ne comprends rien à Mlle François. Il faut qu’ilc lui soit arrivé quelque chose ou qu’elle soit malade. J’aurais dû envoyer savoir cela. D’un autre côté, je ne veux pas avoir l’air de courir après elle, ce qui fait que je reste tranquille. Bonjour mon petit homme, je t’aime. M’aimes-tu ? Tu es bon, tu passes tes nuits pour moi, mais ce n’est pas une preuve d’amour dans un homme aussi dévoué et aussi généreux que toi. Je voudrais savoir si tu m’aimes comme je t’aime avec le cœur et l’âme ? Malheureusement ce n’est pas chose facile. Depuis un an, je crois que tu m’aimes moins et cependant tu ne m’as jamais donné plus de preuves de dévouement, tu n’as jamais passé plus de nuits pour moi. Mais je te le répète, tu es un homme à faire tout cela sans amour et par pure générosité. Mon Dieu, je souffre de douter de ton amour quand moi je t’aime plus que jamais.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16333, f. 196
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « appercevoir ».
b) « voye ».
c) « qui lui soit arrivé ».

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