20 octobre 1867

Guernesey, 20^a octobre [18]67, dimanche, 7 h. du m[atin]

Bonjour, mon cher petit piocheur, bonjour aux quatre points cardinaux de ton ciel et de ton cœur. Je t’aime. J’espère que ton signal matinal veut dire : bonne nuit et bonne santé, ce qui me ravit. Moi aussi j’ai très bien dormi et je me porte très bien en ce moment. Je suis contente que tu aies approuvé mon savoir-faire avec la servante qui est venue s’offrir hier au soir. Dans aucun cas, je n’agirais autrement, sachant trop bien par expérience combien cette engeance est disposée à abuser du moindre prétexte pour vous exploiter et vous faire endiabler. Ceci accordé, je dois convenir que je suis sans enthousiasme pour la jeune sercquiaise^b [1] qui doit m’arriver. La pensée d’avoir à recommencer les douze travaux d’Hercule sur cette primitive stupide avant d’en obtenir un service régulier n’est pas faite pour me monter l’imagination. Mais la nécessité commande. Il faut lui obéir, ne fût-ce que pour en donner l’exemple à cette [illis.] Agnès [2]. Sur ce, je vous tire ma révérence et je vous baise les mains avec dévotion.

BnF, Mss, NAF 16388, f. 253
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « 19 ». La date du « 20 » a été rajoutée sur le manuscrit d’une main différente de celle de Juliette.
b) « serquoise ».