16 juillet 1855

Jersey, 16 juillet 1855, lundi après-midi, 2 h.

Dans quel état tu as dû arriver hier au soir chez toi, mon pauvre petit homme, j’en avais vraiment pitié et j’en ai rêvé la nuit. Mais aussi c’est la faute. Pourquoi ne veux-tu jamais écouter^a mes conseils quand ils sont bons ? Une autre fois tu m’obéiras et tu t’abriteras sous un parapluie quand il pleuvra à verse. J’espérais que je te verrais ce matin mais je vois que le beau temps t’a fait peur. Quant à moi, j’avais pris mon bain avant six heures. Telle est ma force. Je ne suis pas comme ces Totos mouillés qui ne peuvent se risquer dans un [verre  ?] d’eau que lorsque le soleil l’a mis en ébullition. Telle que vous me voyez, je me fiche de vous, telle est encore ma force. À propos le pauvre chien [1] a été enterré ce matin par le LIÈVRE. Quel sort ! Le surhomme du Heaume est arrivé juste à temps pour recevoir son dernier soupir. Voilà tous les LOCAUX du Hâvre-des-Pas aujourd’hui. J’ai reçu une lettre de la mère Lanvin laquelle me dit qu’elle a payé pour moi les impositions montant à 23 F. 11 s. Il va falloir les lui faire tenir au plus vite ainsi que les deux termes de loyers échus d’avril et de juillet. En même temps, elle me donne des nouvelles du brave curé qui parle toujours de nous avec la plus vive sympathie. Je devrais lui écrire pour le remercier de son bon souvenir mais je suis si paresseuse que je crains bien de n’en rien faire. En attendant, j’ai deux ou trois belles roses fleuries en l’honneur de mademoiselle ADÈLE. Vous les emportez ce soir. D’ici là, je vous baise.

Juliette

BNF, MSS, NAF 16376, f. 281-282
Transcription de Magali Vaugier assistée de Guy Rosa

a) « écouté ».