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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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14 mars 1839

14 mars [1839], jeudi, midi ¼

Bonjour mon cher bien-aimé, bonjour mon bon petit homme, je t’aime. Je ne suis plus folle, je t’aime et je te désire de toute mon âme. Je suis un peu contrariée : Mlle Watteville est arrivée de Saumur et est venue pour me voir ce matin. La bonne qui ne la connaît pas et qui n’était pas avertie ne m’a pas réveillée de sorte que je ne l’ai pas vue, qu’elle m’a écrit un petit mot assez froid et que je pense qu’il faudrait aller la voir le plus tôta possible pour ne pas l’affliger. En attendant, je vais lui écrire une petite lettre pour m’excuser du malentendu. Je t’aime, mon Toto bien-aimé, je t’aime, mon Victor chéri. Tu es mon pauvre ange-gardien. Sans toi, il est probable qu’il y aurait déjà longtemps que je ne serais plus qu’une pauvre damnée. Tu es mon amour et ma vie : tu es ma consolation et ma joie, tu es mon pauvre ange bien-aimé. Je ne serai pas méchante aujourd’hui, tu verras, je serai bonne, joyeuse et par-dessus tout amoureuse. Comment vont tes yeux, mon adoréb ? Comment vas-tu, mon pauvre petit homme ? Je voudrais bassiner tes pauvres beaux yeux avec mes lèvres. Je voudrais délasser tes chers petits pieds avec mes baisers. Je voudrais me faire ton petit REMÈDE depuis les pieds jusqu’à la tête. Je t’aime, je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 259-260
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « plutôt ».
b) « adorés ».


14 mars [1839], jeudi soir, 9 h. ¼

Je pense à toi, mon bien-aimé. Je te désire, mon adoré. Je voudrais que ma pensée eût des ailes pour te porter mon amour. Je suis si remplie de toi, je t’aime tant, que de t’aimer de loin ne me suffit pas. J’espérais, mon Toto, que tu viendrais me voir un peu ce soir, ou bien encore que tu me mènerais aux danseurs espagnols [1] mais je vois bien qu’il ne m’arrivera rien de tout cela et qu’il faut que je vous aime à SEC. Je ne vous ai pas CALOMNIE, mon amour, j’ai été pour vous ce que vous méritez : en admiration et en adoration car vous êtes mon beau Toto bon et généreux. J’avais sur moi assez d’argent pour payer la note de l’épicier. Je l’ai donné à Mme Pierceau pour qu’elle me fasse le plaisir de faire acquittera ma facture, du reste je n’ai vu qu’elle et je ne verrai probablement qu’elle jusqu’à ce [que] tu viennes me chercher. Je voudrais que ce fût tout de suite car j’ai un besoin pressant de te voir. C’est que c’est très pressé voyez-vous, mon adoré, parce que ça me monte, ça me monte comme du lait sur le feu. Je t’aime, mon Toto, je ne dis que ce mot-là mais je ne sens que de l’amour, je ne veux que de l’amour, ainsi c’est bien juste que je le dise de toutes mes forces.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 261-262
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « aquitter ».


14 mars [1839], vendredi, midi ½

Bonjour, mon bon petit homme, comment vas-tu, mon bien-aimé ? Comment vont tes chers yeux ? Tu m’avais promis de venir te reposer mais tu ne peux pas te décider à tenir tes promesses. Tu n’as pas plus pitié de mon cœur que de ta personne, tu fatiguesa tes yeux et tu désespèresb mon amour. Je ne t’en veux pas, mon cher adoré, seulement je m’attriste de plus en plus et je perds tout espoir de bonheur dans l’avenir puisque plus nous allons et moins nous en avons. Je t’aime, mon cher petit bien-aimé. Je t’aime de toute mon âme et je te le prouve bien par les plaintes continuelles que je ne peux pas m’empêcher de faire sur ton absence. Une autre aurait pris son parti depuis longtemps et sec serait RÉSIGNÉE, comme tu dis, mais moi je ne pourrai jamais me résigner à ne te voir que quelques minutes dans un jour. Je t’aime trop pour que chaque heure qui s’écoule loin de toi ne me paraisse pas un siècle. C’est pas ma faute. Il fait bien vilain aujourd’hui. J’espère que ce mauvais temps te ramènera un peu plus tôtd dans ma maison et que tu SENTIRAS LE BESOIN de rester plus longtemps auprès de mon feu.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 263-264
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « fatigue ».
b) « désespère ».
c) « ce ».
d) « plutôt ».

Notes

[1À élucider.

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