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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 mai 1879

Paris, 3 mai [18]79, 7 h.

Cher bien-aimé, j’espère que tu as fait une bonne nuit, puisse mon désir être une réalité. Dans la crainte de la troubler je t’ai caché hier la mort de la pauvre petite Berthe Dorian [1], arrivée à trois heures de l’après-midi. Il avait été convenu avec Lockroy qu’on n’en parlerait pas à cause de Mme Lockroy et des enfants, pour épargner à la mère le chagrin de ses chers petits s’ajoutant au sien si douloureusement poignant. Cela t’explique, mon grand bien-aimé, la tristesse que tu remarquais malgré les efforts que nous faisions tous les trois pour te la cacher ainsi qu’à tes chers petits-enfants. M. et Mme Lockroy sont retournés tout de suite après nous avoir quittés auprès de la pauvre mère dont le désespoir fait pitié. Ils ont dû y passer la nuit et je ne pense pas qu’ils soient encore rentrés. Quant à moi qui connaissais à peine cette belle jeune fille je n’en aia pas moins le cœur serré en pensant à la pauvre mère tant le souvenir de mon propre désespoir est encore présent malgré le grand nombre d’annéesb qui ont passé dessus, malgré les rudes épreuves qui m’ont déchiré le cœur dans tous les sens depuis la mort de ma pauvre fille bien-aimée [2]. Peut-être trouveras-tu qu’il y a lieu pour toi d’écrire quelques mots affectueux et suprêmes à cette malheureuse femme. Quant à moi, je ne pourrais écrire qu’à Mme Ménard mais il faudrait pour cela pouvoir vaincre ma réserve incurable, ce qui me paraît impossible en ce moment. Cher adoré, je te bénis et je prie Dieu de t’épargner toutes les douleurs de cette vie quelles qu’ellesc puissent être.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16400, f. 118
Transcription de Chantal Brière

a) « n’ai ».
b) « année ».
c) « quelqu’elles ».

Notes

[1Berthe Dorian est la jeune sœur d’Aline Dorian, dont la fille Pauline épousera le petit-fils de Victor Hugo, Georges.

[2Claire Pradier est morte le 21 juin 1846.

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