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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 octobre [1844], vendredi matin, 9 h. ½

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour, mon adoré petit homme, bonjour, toi, bonjour, vous, comment que ça va ce matin ? As-tu un peu dormi cette nuit ? M’aimes-tu ? Te verrai-je bientôt ? Voilà quatre petites questions qui me tiennent bien au cœur, tu serais bien gentil de venir tout de suite m’en donner les réponses. Je voudrais bien, mon Toto chéri, que tu n’ailles pas chez M. Molé, si cela se peut sans inconvénient pour la politesse et les procédés, ce que je ne sais pas. Quand je pense que ta visite chez ce M. me privera toute une éternelle journée du bonheur de te voir, je suis capable de sauter à pieds joints par dessus toutes les convenances et tous les égards du monde.
Cependant, mon cher amour, fais ce que tu croiras indispensable de faire. Je serai malheureuse toute une journée, voilà tout. Je devrais en avoir pris l’habitude depuis longtemps, mais je ne m’habituerai jamais à ne pas te voir. J’en souffre autant et plus que la première fois. Ça n’est pas ma faute, n’est-ce pas mon amour ? Baise-moi, plains-moi et aime-moi, viens bien vite et je serai la plus joyeuse et la plus heureuse femme du monde car je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 211-212
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette


4 octobre [1844], vendredi soir, 8 h. ½

Vous êtes bien hardi pour avoir osé profaner mon SACRÉ VASE ! Que je vous y prenne encore, pôlisson, et vous verrez de quel bois je me mouche. En attendant, je veux bien vous pardonner encore cette fois-ci, mais n’y revenez pas si vous tenez à vos précieux jours.
Je suis dans le ravissement de votre cœur, bien qu’il soit vide. Mais j’ai l’espoir que vous le remplirez bientôt de quelque chose de bon, ce qui me le fait paraître dix mille millions de milliards de fois plus beau. Cher adoré, merci, merci, tu me combles, ma petite médaille, la timbale de Mme Pierceau, ton buste, ton cœur et le reste, tu es mille fois trop bon pour moi. Je le sens bien, va, tout ce qu’il y a de généreux, de doux et de charmant dans ces petits cadeaux si multipliés. Cependant, je dois te dire qu’ils n’ont pas en amour la même vertu qu’en amitié. Ils n’entretiennent ni n’augmentent rien. Mon amour ne saurait se grandir quand tu me donnerais le monde entier, quand tu me donnerais ta vie. À l’impossible nul n’est tenu, pas même une pauvre Juju comme moi.
Je t’attends, mon Victor, et je ne me coucherai qu’à la dernière extrémité pour ne pas te désobéir. D’ailleurs je veux conserver mes yeux pour te voir, pour t’admirer et pour t’adorer toute ma vie.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 213-214
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

a) « timballe ».

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